jeudi, février 23, 2012

Voter contre ses propres intérêts





Depuis plus d'un siècle, les analystes politiques tentent de manière récurrente d'expliquer pourquoi tant de gens semblent choisir de "voter contre leurs propres intérêts". Pour le dire plus nettement, pourquoi tant de salariés, sans compter tous ceux qui sont enfermés dans la pauvreté, votent-ils pour des partis politiques dont les programmes favorisent sans équivoque les riches ?

Au milieu du XIXe siècle, Il était de mise pour les politiciens et les écrivains préoccupés par l'avenir des personnes aisées de craindre que le suffrage universel (c'est-à-dire exercé par tous les hommes) ne mène inexorablement à l'élection de gouvernements qui chercheraient à exproprier de leurs richesses des élites restreintes au profit de pauvres innombrables. Mais cela ne s'est pas passé ainsi. Bien que des partis sociaux-démocrates ou socialistes aient pris le pouvoir légalement dans un certain nombre de pays, très peu de gouvernements démocratiquement élus ont entrepris de redistribuer massivement les richesses des classes aisées au reste de la population. Pourquoi les votes dont disposaient tous les hommes (et, parfois, toutes les femmes) n'ont-ils que si faiblement remis en question les intérêts fondamentaux des riches et des grandes entreprises ?

Une foule de facteurs contribue à expliquer pourquoi tant d'électeurs des classes populaires soutiennent les partis conservateurs. Il s'agit d'antagonismes ethniques, raciaux, religieux, nationaux et régionaux qui ont divisé — et divisent toujours — les classes populaires. Il faut compter en outre avec le ressentiment des travailleurs à l'encontre des chômeurs et des assistés sociaux, et l'envie que portent les salariés du privé à ceux du secteur public, qui bénéficient d'une meilleure sécurité de l'emploi. Chez les non-syndiqués, il y a le sentiment que ceux qui le sont jouissent d'avantages injustes.

Encore et surtout, il y a la redoutable autorité de ceux qui détiennent le pouvoir dans l'ordre établi ; ces derniers parviennent à convaincre une grande partie de la population que leur modeste place dans le système existant est préférable à tout ce qu'ils pourraient espérer en luttant pour une société plus équitable.

James Laxer


Bonze





Bonze :

Moine bouddhiste au crâne rasé, qui n'en fiche pas une rame. Se dit également de quelqu'un, pas forcément chauve, à qui sa position de hiérarque inamovible permet de bonzer en paix.

Beaucoup, qui ont commencé hérétiques, finissent bonzes. Les résistants gaullistes devinrent des bonzes après 1958. Les « nouveaux philosophes » des années 70 bonzèrent dans les années 80. Jean-François Revel est doublement bonze. Le bonze n'est jamais responsable de rien : son côté bonze Pilate.

Leur hymne : « Tiens voilà du bouddha ».

Jean-François Kahn, Dictionnaire incorrect.

Photo : Sur la route de Marco Polo, voyage de Venise à Pékin, Michael Yamashita.

mercredi, février 22, 2012

Nouvel An tibétain





Le Losar 2012, le Nouvel An tibétain, débute le 22 février et dure deux jours. 


Ces festivités sont redoutées par les autorités chinoises depuis que des moines s'immolent par le feu pour protester contre la perte de leurs privilèges. Les Chinois tentent de démasquer des agitateurs venus de l'étranger. 7000 pèlerins arrivés d'Inde sont actuellement interrogées par la police.

Les adeptes du lamaïsme, doctrine ésotérique tantrique dissimulée sous un vernis bouddhiste, sont totalement soumis à leurs maîtres par des serments d'allégeance très stricts. Il n'est pas étonnant d'apprendre que les malheureux suicidés sont en majorité des moines endoctrinés et manipulés.

Des dignitaires du lamaïsme n'acceptent toujours pas la fin de leur dictature à la suite de l'arrivée des Chinois au Tibet. Ces hiérarques, hostiles à la Chine, sont particulièrement choyés par l'empire anglo-américain. La Fondation Rockefeller a financé l'implantation des premiers centres d'études tibétaines en Occident .

En réalité, la nouvelle crise tibétaine qui se dessine a pour objectif la déstabilisation de la Chine. L'attaque de l'Iran par les forces de l'empire anglo-américain et d'Israël provoquera une réaction des Chinois. Le président Hu Jintao a averti les USA : « en cas d'une intervention militaire contre l'Iran, la Chine entrera immédiatement et directement en guerre contre les États-Unis ». Mais des émeutes au Tibet pourraient affaiblir, voire neutraliser, la réplique chinoise.

Depuis le début de la guerre froide jusqu'à maintenant, le lamaïsme sert secrètement les intérêts de l'empire anglo-américain.

Le Losar pourrave d'Alexandra David-Neel :

mardi, février 21, 2012

Les bonbons halal



Beaucoup de confiseries contiennent de la gélatine animale. La gélatine, mentionnée sous l'appellation E441, est un produit émulsifiant considéré comme impur par de nombreux religieux. « C'est un additif haram », disent les musulmans. Pour cette raison, les Carambars ne seraient pas consommés par les juifs, les musulmans, les jaïns, des brahmans strictement végétariens...

Le Carambar made in France

Quel rapport entre la tarte Tatin, les bêtises de Cambrai et le Carambar ?

Tous ces délices sont le fruit d'une erreur. En 1954., deux ingénieurs de Delespaul-Havez, dans Le Nord, ne sachant que faire d'un surplus de cacao, l'ajoutent dans une machine à fabriquer des caramels... Cette dernière ne doit pas comprendre ce qui lui arrive et met au monde une espèce de frite de 6,2 centimètres ! Du caramel en barre... le Caram'bar (avec une apostrophe) est né ! Les enfants vont l'adorer.

Au début des années 1960, on en vend 300 millions de barres par an en France. Tant et si bien que le petit Caram'bar va grandir : à 18 ans, il prend d'un coup 2 centimètres et est promu « Super Caram'bar » (1972). À lui les grands moyens : il se vend en sachet familial. Un an plus tard, on lui donne des petits frères, les Caram'bar Fruits (fraise, orange, citron). Pour ses 23 ans, en 1977, il se mue en Carambar, en un seul mot.

La famille continue à s'agrandir : le Carambar Réglisse essaie de percer, mais s'avère moins doué que son cadet au cola qui, lui, acquiert son statut de vedette en 1984. On devient de plus en plus original dans la tribu : après les « Deux Goûts » (banane-fraise et tutti frutti-citron vert), voici les « Eloustic » fourrés, les « Elousticolor » (qui colorent la bouche), les « Atomic » qui piquent un max (au citron vert, à la framboise et au cactus). On continue aussi à flirter avec les boissons : après le cola, Orangina en 2002 et grenadine en 2003.

Par-delà la variété de ses goûts, Carambar a d'autres armes pour séduire. D'abord son prix minime, lequel correspond à cette petite pièce qui traîne dans la poche et que l'enfant obtient sans trop de mal 5 centimes à l'origine, 10 centimes d'euro aujourd'hui. Sa dégustation, ensuite, qui obéit à tout un rituel : il faut le tordre pour le partager ou le mâchouiller. En se gardant surtout de déchirer l'emballage, qui recèle un autre « plus » : une blague, une devinette, un jeu de mots, un rébus...

Le jeu a toujours fait partie de la tradition Carambar. Au début, on collectionnait des points pour gagner des patins à roulettes, des voitures miniatures... En 1969, les gagnants du grand concours pour petits gourmands sont récompensés par... leur poids en Carambar !

Michèle et Frank Jouve, Made in France.


Les affaires sont les affaires. Haribo, marque allemande de confiseries, a accepté les diktats religieux. Ses bonbons halal contiennent de la gélatine animale provenant de bêtes égorgées conscientes (donc non étourdies).



La consommation de la chair des animaux est-elle prescrite par le Coran ?

Certes, le Coran permet la consommation de viande. Mais une permission n'est pas une prescription. En faire une obligation constituerait une interprétation particulière du Coran. Or, il en existe une autre : l'idée que la viande n'est pas une nécessité, et qu'on peut donc s'en passer si l'on veut respecter la vie des animaux et leurs droits fondamentaux.

Nombreux sont les musulmans à avoir développé une préoccupation pour les animaux, tel le prophète Suleyman, qui leur parlait et les protégeait selon le Coran. Aujourd'hui on trouve de plus en plus de musulmans pour défendre les animaux, à l'exemple de Abdul Wahid Pedersen, imam danois qui estime qu'il est du devoir de chaque musulman de se battre pour les droits des animaux, « même impurs », ou encore le philosophe français de confession musulmane Morad El Hattab. Aussi certains musulmans ont-ils choisi de devenir végétariens, comme le célèbre poète Aboul Ala El-Maari (973-1057), ou plus récemment Basheer Ahmad Masri (1914-1993). De même, le soufisme (courant mystique de l'Islam) préconise le végétarisme. Citons quelques maîtres contemporains comme Bediuzzaman Nursi (1877-1960) et Bawa Muhaiyaddeen (mort en 1986), qui écrit (trad. Foltz) : « Toute votre vie vous avez bu le sang et mangé la chair des animaux sans vous rendre compte de ce que vous faisiez. Vous aimez la chair et le meurtre. [...] Dieu nous regarde. Demain Sa vérité et Sa justice feront enquête là-dessus. Vous devez vous en rendre compte ». Source


lundi, février 20, 2012

Refusons la cruauté religieuse et l'égorgement rituel des animaux





La pratique rituelle de l'égorgement d'animaux pleinement conscients serait très répandue en France.

« En France, 80% des ovins, 20% des bovins et 20% des volailles seraient abattus selon le rite halal », affirme un rapport du ministère de l'Agriculture et du ministère de l'Intérieur de septembre 2005 publié sur le site www.abattagerituel.com. « Les producteurs d'ovins et de bovins ont un intérêt économique puissant à organiser une complémentarité entre les circuits de distribution classique et halal à partir d'animaux abattus de façon rituelle », constate ce rapport. « Les morceaux arrière trouvent des débouchés auprès des consommateurs classiques alors que les avants et les abats s'orientent majoritairement vers les consommateurs musulmans », est-il écrit.

La généralisation de l'égorgement d'animaux sans étourdissement préalable est un nouveau scandale qui doit provoquer le boycott de la viande par tous ceux qui refusent la cruauté religieuse.

De plus, contrairement aux idées répandues par le lobby de la viande, l'abstinence de l'alimentation carnée est bénéfique pour la santé des consommateurs.


La viande et ses dangers

Vous serez peut-être étonnés d'apprendre qu'après le tabac et l'alcool réunis, la consommation régulière de viande constitue très certainement le plus important facteur de mortalité aux États-Unis et dans les autres pays industrialisés. Contrairement à l'opinion répandue, il est plus difficile d'équilibrer son alimentation en consommant de la viande qu'en s'en abstenant ; avec un régime végétarien il n'y a pas de risque de carences en protéines, et il n'est donc pas indispensable d'absorber des compléments alimentaires pour assurer ses besoins tant qualitatifs que quantitatifs.

Il y a déjà longtemps qu'une prise de conscience s'est faite quant aux effets tragiques de l'alcool et du tabac sur l'organisme humain. Par la suite, les scientifiques ont commencé à se préoccuper des effets de la consommation de viande sur la santé et la longévité. Leurs recherches ont démontré d'une manière incontestable les effets nocifs de la consommation régulière de viande ; les connaissances qui découlent de ces études nous donnent les moyens de préserver notre santé et d'améliorer notre espérance de vie.

Pendant ces dernières années tout spécialement, des études à grande échelle ont confirmé les vues de nombreux médecins et scientifiques qui étaient parvenus à la conclusion suivante : la consommation de viande est à éviter pour au moins six raisons :

1. Elle est l'un des facteurs de décès les plus importants dans les pays industrialisés.

2. Son coût est extrêmement élevé par rapport à sa valeur nutritionnelle.

3. Sa production entraîne un énorme gaspillage d'énergie.

4. Elle manque de deux éléments nutritifs essentiels les fibres végétales et les hydrates de carbone.

5. Contrairement à la croyance populaire il est difficile de parvenir à un bon équilibre nutritionnel en consommant régulièrement de la viande.

6. Une alimentation variée, sans viande, permet d'éviter beaucoup de problèmes de santé. [...]

L'état Nutritionnel des personnes ne mangeant pas de viande est excellent.

L'état nutritionnel des personnes ne mangeant habituellement pas de viande est tout à fait satisfaisant. Elles ont une plus grande espérance de vie, une mortalité près de deux fois plus faible que la moyenne pour les maladies coronaires et le cancer.

Des études de Hardinge comparant des végétariens complets à des lacto-ovo-végétariens et à des non-végétariens montrent que tous les végétariens absorbent suffisamment d'éléments nutritifs de toutes catégories.

Tous les groupes végétariens ont un apport alimentaire qualitatif et quantitatif qui correspond ou dépasse les recommandations du Conseil national de la recherche en matière de nutrition, à l'exception des adolescents végétariens complets qui sont en dessous des valeurs optimum mais en dessus des valeurs minimum. Ainsi rien ne laisse supposer, dans ces études, qu'une alimentation lacto-ovo-végétarienne pourrait entraîner une nutrition inadéquate, et ceci vaut également pour les femmes enceintes.

D'une manière générale, le poids, la taille et la pression sanguine étaient semblables dans tous les groupes, à l'exception des végétariens complets, qui étaient d'une dizaine de kilos en moyenne plus légers que les autres. Les protéines totales, les albumines, les globulines et d'autres valeurs sanguines ne présentaient pas de différences statistiquement significatives.

Les végétariens absorbent donc, en moyenne, une quantité de protéines tout à fait adéquate. Non seulement la quantité d'acides aminés essentiels de leur alimentation correspond aux besoins minimum mais elle dépasse souvent le double de ceux-ci.

Dr. John A. Scharffenberg.







Envoyé spécial du 16 Février 2012 
(reportage complet) 




Illustration :
Man, dessinateur au Midi Libre.







samedi, février 18, 2012

Une conception de vie à refaire





Le sentiment de privation envahit le quotidien : privation par rapport à un passé injuste qui n'a pas donné son tribut d'affection, privation par rapport à un avenir sans avenir, privation par rapport à un milieu extérieur qui n'offre ni appartenance ni sécurité, privation par rapport à un milieu intérieur fait d'incertitude et de culpabilité. Privé d'un avant nourrissant et d'un après prometteur, d'un dehors rassurant et d'un dedans qui soit fort, chacun de nous, à des degrés divers, éprouve la difficulté de vivre son présent et d'occuper son espace.

Le sentiment de privation accentue avec le temps des impressions de vide, de lourdeur et de fermeture qui constituent pour l'essentiel exactement le contraire d'une vie vivante.

Impression de vide

Le vide intérieur est difficile à décrire précisément parce qu'il n'est rien. Il se reconnaît au fait que rien n'est ressenti. C'est le constat qu'il ne se passe rien. Alors il faut agir. Il faut que quelque chose arrive, il faut rencontrer des circonstances qui vont occuper ce vide car, sans cet extérieur à soi, il se produit une sorte de néant.

L'individu a donc tendance à se concevoir comme un vide à remplir : il fume, boit et mange, non par plaisir mais par une sorte de fatalité. Il s'installe dans la vie en adoptant le point de vue du contenant. Il reçoit des images, des sons, des stimulations. Il entend des opinions, il assimile de l'information. Il voit sur l'écran les rêves des autres, il regarde vivre.

Son manque à être se dissimule aussi dans l'envie insatiable de posséder, d'obtenir des privilèges, d'avoir du prestige et du pouvoir.

Son manque à être se dissimule aussi dans le bavardage et la turbulence. Il se remplit de mots. Il se laisse intoxiquer par les abstractions. Il fait siennes les modes qui passent, qu'elles soient vestimentaires ou religieuses.

Ce sont là des formes de consommation qui trouvent leur origine dans la peur du vide, dans l'appréhension de mort que laissent le silence et l'inaction.

C'est ainsi que, par difficulté à tolérer cette apparence de néant, certaines personnes en viennent à se croire privées de vie intérieure. Elles se conçoivent comme des êtres de surface qui se feront l'écho de leur environnement. Le sentiment global de privation induit la personne à se considérer inapte à vivre de sa propre inspiration, ce qui la convainc de laisser aux autres et aux institutions la conduite de son existence.

L'impression de vide laisse tout l'espace nécessaire à une philosophie de vie dans laquelle l'être humain devient un objet. Il fait partie de la civilisation de l'objet. Les chercheurs en psychologie n'ont pu échapper à la tentation de le décrire comme un être extérieur. Il est la réponse à un stimulus. Le schème de comportement stimulus-réponse contient implicitement le postulat que l'action vient du milieu et que l'individu est un être de réaction.

Chacun en devient tellement convaincu qu'il attend presque constamment une consigne pour agir. Ceux qui ont l'expérience de l'animation de groupes savent quel désarroi entraine chez les participants l'absence d'une structure et d'une définition claire de ce qu'il faut faire.

Toutes ces consignes et ces conventions prennent leur pouvoir dans la philosophie de l'homme objet, de l'homme sans intériorité qui finit par ignorer ses désirs et ses impulsions.

La division tayloriste du travail a non seulement fragmenté l'ouvrage de l'artisan en une multitude de gestes insignifiants, mais elle a réussi de plus à imposer une définition strictement mécaniste de l'homme. L'être humain devient dans ce contexte un ensemble de comportements qu'il s'agit d'ajuster aux caractéristiques technologiques de la production. Cette situation élimine pratiquement toute idée de vie intérieure.

On ne saurait soupçonner combien les modes industrielles influencent nos philosophies de vie. Nous avons été successivement depuis quelques décennies homme machine, homme ordinateur, homme cybernétique et maintenant homme de l'astrophysique. L'être humain est devenu de la vibration, de la bioénergie et de la lumière qui irradie. Ce sont là des modèles scientifiques qui alimentent la recherche en psychologie. Que dire alors de l'imagination populaire qui raffole des exploits de l'homme bionique, de l'homme qui a incorporé des circuits électroniques à son système nerveux ? Que dire aussi du phénomène inverse où des robots se mettent à éprouver des sentiments humains ? La grande popularité que connaît le cinéma de l'occultisme et de la possession rend compte également de cet homme objet. Ces conceptions, qu'elles soient expérimentales ou fictives, expriment unanimement que nous sommes vides et que la qualité de notre existence tient à des apports extérieurs.

Nous subissons l'humiliation de tous ces livres qui nous disent comment vivre, comment s'alimenter, comment cesser de fumer, comment se maintenir en forme, comment se faire des amis, comment respirer, comment méditer, comment mener un groupe, comment s'exprimer, comment faire l'amour, comment vaincre l'obésité, comment rester jeune, comment améliorer sa mémoire, comment dialoguer avec ses enfants, comment réussir son divorce, comment ne pas déprimer, comment contrôler ses rêves, comment planifier sa retraite, comment se relaxer, comment programmer son subconscient. Cette liste a quelque chose d'interminable. Elle véhicule le message que ce sont là des comportements qu'il faut apprendre, et qui ne sont pas naturels. Et nous devenons, à notre insu, persuadés que nous sommes vides, que nous n'avons pas ces ressources et que nous devons les acquérir. Nous allons donc apprendre à jouir, à toucher, à sentir, à imaginer, à créer. Nous allons apprendre à aimer, à être tendre, à nous mettre en colère, à écouter les autres, à communiquer.

Serions-nous à ce point aliénés de nos désirs que nous ne saurions plus agir spontanément, à ce point qu'aucun instinct ne puisse nous guider ? La vie aurait-elle son mode d'emploi ?

On cherche à faire avec l'homme ce qu'on fait avec la matière : découvrir des lois pour les reproduire à volonté. L'utopie scientifique voudrait, en ce qui concerne l'individu, comprendre, disons, les « mécanismes » du « processus » de création pour pouvoir inventer sur commande ou encore décomposer l'ascendance qu'exerce une personne en propriétés observables et reproductibles, de sorte que quiconque puisse l'exercer.

Reproduire le phénomène en dehors de son contexte naturel, en dehors des motivations qui l'engendrent et de la philosophie qui le sous-tend, voilà ce que veut le spécialiste du comportement : le plaisir en dehors d'une femme qui inspire, la création en dehors du rêve qui la porte, le leadership en dehors d'une cause qui passionne.

Si nous arrivons à nous concevoir sans l'ombre d'un doute comme des êtres de désir et d'intention, nous ne pourrons tolérer cette panoplie de laboratoire qui désespère finalement ceux qui en font l'usage, car ils ne feront jamais un chef-d'œuvre avec de la peinture au numéro.

Cette conception de l'homme en tant qu'il est un objet peut même empêcher l'individu de s'éprouver directement et c'est là sans doute la conséquence la plus troublante du vide intérieur. Ronald Laing, l'antipsychiatre anglais, rapporte dans le Moi divisé comment un de ses anciens professeurs expliquait la manie qu'avait un patient de se regarder dans un miroir. C'est la seule façon pour lui, disait-il, de savoir qu'il existe.

Certains croient sincèrement que le bonheur consiste à être content de soi. Il n'est pas dans la volupté d'un corps, dans le charme d'une musique ou dans l'excitation de la course, non, il est dans la satisfaction de l'image de soi. Cela veut dire qu'on met parfois son existence à se doter d'attributs personnels et de qualités qui pourront ultimement plaire aux autres et à soi. Cela veut dire que l'individu, quoi qu'il fasse, se préoccupe de ce qu'il a l'air d'être plutôt que de ce qu'il expérimente. Il fait abstraction du plaisir ou du déplaisir qu'implique tel comportement ou telle situation, pour ne considérer que l'adéquation de ce qu'il fait avec l'idéal qu'il a de lui-même et qui correspond presque invariablement à ce qui est souhaité par l'entourage. Il ne s'éprouve pas directement. Il ne connaît de lui que des images. Il ne sait pas qu'il est triste. Pour le savoir il faudra qu'un autre le lui révèle, et cela ne garantit pas pour autant qu'il parviendra à percevoir son propre sentiment.

Son identité est toute relative. Elle ne surgit pas de l'intérieur comme la certitude absolue et radicale que ce qu'il éprouve, il l'éprouve vraiment, que personne ne pourra nier que ce qu'il ressent, il le ressent comme tel. Cette identité relative fait qu'il n'est jamais sûr de ce qu'il vit, de ce qu'il désire, de ce qu'il craint. Il se devine, il se déduit logiquement, il s'explique, mais il ne s'appartient pas. Il existe à travers les perceptions que les autres ont de lui.

Au lieu de connaître intimement la jouissance d'être, il ne tire de la vie que la satisfaction symbolique d'être quelqu'un d'estimable. Il y a connaissance de soi et connaissance de soi. Le malentendu consiste à se faire une identité en collectionnant des images et des explications plutôt qu'en exprimant des états intérieurs et des convictions.

L'être intérieur, l'homme sujet de son expérience sent qu'il existe absolument, qu'il est une fin en soi, qu'il devient d'autant plus lui-même, d'autant plus réel qu'il éprouve plus intensément et plus totalement ce qu'il vit.

Denis Pelletier

Dessin :

vendredi, février 17, 2012

Qu'est-ce qu'une société riche ?





Qu'est-ce qu'une société riche ? Est-ce simplement une société dont le PIB est très élevé, c'est-à-dire dans laquelle les échanges marchands sont considérablement développés, même si la consommation est extrêmement mal répartie et les écarts de revenus très importants, même si l'accès de tous aux biens premiers n'est pas assuré, même si coexistent dans l'ignorance mutuelle une petite proportion de personnes très riches et de plus en plus de pauvres, même si la violence se répand et que les riches s'enferment dans des ghettos, même si des biens et services de plus en plus nombreux sont payants et si les conditions quotidiennes de vie (le transport, le cadre de vie, la sécurité physique) deviennent de moins en moins supportables, même si la xénophobie se développe et si la simple idée d'intérêt général fait sourire ? La réponse est bien évidemment non. […] Une société riche, est-ce une société dont le seul lien est réduit à l'échange marchand et à la coexistence sur un même sol ? Et dans une telle société, que peut signifier le taux de croissance du PIB ?

Nous vivons les yeux rivés sur des indicateurs qui nous disent qu'une société riche est une société dont la production est élevée et majoritairement échangée sur un marché. Une certaine théorie économique ose même soutenir que si l'on ne peut changer la situation de l'un (par exemple celle du pauvre) sans « aggraver » la situation de l'autre (par exemple celle du riche), alors nous nous trouvons dans une situation d'optimum social. On peut donc avoir un optimum social dans une société où une petite minorité de personnes riches, qui serait à l'origine d'une grosse production, regarderait la majorité de la population se débattre dans la misère. Mais le PIB ne fait place à aucun autre critère de mesure, à aucune autre valeur : la répartition des biens, le degré de violence, la qualité des services publics, la cohésion sociale...

Il nous faudra revenir sur cette dernière notion, qui n'est que l'avatar de ce que l'on appelait auparavant le lien social. En effet, une bonne société n'est-elle pas d'abord celle où le lien social est fort et dense et, par conséquent, où les inégalités sont peu développées, l'accès aux biens premiers donné à tous, les risques pris en charge de façon commune ? Certes, le degré de cohésion sociale est difficile à mesurer, et plus encore à « fabriquer » : on se souvient des invitations de Rousseau à multiplier les fêtes de village où les citoyens se retrouveraient et se distrairaient ensemble, rendant ainsi vivante leur communauté et plus solides leurs liens, en dehors de toute opération de nature économique. Cela nous fait sourire aujourd'hui. On ne peut pour autant éviter de penser que la force du lien social, c'est-à-dire le sentiment d'appartenir à une même société, liée par des droits et des devoirs, des institutions politiques, des valeurs et une histoire, donc par une solidarité qui doit sans cesse être mise à l'épreuve, est un élément essentiel d'une bonne société, et constitue à l'évidence l'une de ses richesses. Autrement dit, la densité réelle du lien social aussi bien que l'attachement affectif et théorique à l'idée de société et de solidarité constituent des facteurs qu'il faut absolument prendre en compte dans une recherche sur les composants de la richesse sociale.

Intuitivement, et sans doute au terme d'un petit effort de réflexion qui nous ferait sortir de la gangue des mots et des significations dans laquelle nous sommes enfermés, nous serions capables de dire qu'une société vraiment riche est une société dont tous les membres mangent à leur faim, habitent un logement décent, ont accès aux soins, peuvent se vêtir correctement, s'intéressent à la chose publique, une société dont le cadre de vie n'est pas dévasté, dont les ressources naturelles, comme l'eau et l'air, sont protégées, où les libertés publiques et individuelles sont parfaitement respectées, où le niveau d'éducation est élevé et répandu, où l'égalité des conditions est largement réalisée... Or, de tout cela, notre indicateur ne retient rien, puisqu'il ne s'intéresse qu'aux produits et aux services échangeables sur le marché.

Dominique Méda, Qu'est-ce que la richesse ?


Ces Sociétés transnationales qui tirent les ficelles


Trois chercheurs suisses de l’École polytechnique fédérale de Zurich  (Suisse), spécialistes des réseaux complexes, viennent de déterminer (dans une passionnante étude publiée par la revue scientifique en ligne PlosOne) qui contrôle l’économie mondiale, en travaillant, avec trois modèles spécifiques (notamment en fonction de la détention de participations minoritaires ou indirectes) sur une base informatisée de 37 millions d’entreprises, commençant par déterminer 66 508 sociétés pouvant être considérées comme internationales, puis les 43 060 sociétés dites « transnationales » en analysant ensuite les 1 006 987 liens, en particulier dans l’actionnariat qui existaient entre elles.

Apparaît alors un premier « nuage » de 737 sociétés qui contrôlent 80% du PIB mondial. Puis à l’intérieur de ce « nuage », un noyau dur de seulement 147 firmes qui contrôlent 40% du PIB mondial (et trois quarts des échanges commerciaux). Mais les participations croisées entre ces 147 firmes, font qu’il s’agit, selon les auteurs, d’une « super entité économique dans le réseau global des grandes sociétés », où l’on ne peut déterminer en dernier ressort qui contrôle l’autre.

Le plus inquiétant est que sur ces 147 firmes, les trois quarts appartiennent au secteur financier

Il existe donc un véritable « syndicat caché », un « État profond » de la finance apatride et cosmopolite, qui contrôle l’essentiel de l’économie alors même que les activités bancaires et financières sont des activités purement parasitaires (elles ne produisent rien par elles-mêmes).

Les liens entre ces dirigeants, ces « traders » vedettes et les gouvernements font qu’il s’agit d’un petit milieu très étroit, où les modes, les erreurs, les alliances font qu’une seule décision (en particulier une mésestimation ou une erreur) peut savoir des conséquences colossales sur l’ensemble du système.

Bref,  cette concentration est par elle-même à l’origine d’un risque systématique.

Pour l’essentiel anglo-saxon, les vingt plus importantes sociétés financières ( fonds de pension, assurances, banques, etc.), qui contrôlent ou sont actionnaires d’autres sociétés, sont bien souvent connues des seuls financiers.

Il s’agit (dans l’ordre de leur degré de contrôle du capital des multinationales) de :
Barclays,
Capital Group,
EMR Corporation,
AXA,
State Street Corporation,
JP Morgan Chase & Co,
Legal & General Group,
Vanguard Group,
UBS,
Merill Lynch,
Wellington Management,
Deutsche Bank,
Franklin Ressources,
Crédit suisse,
Walton Entreprise,
Bank of New York Mellon Corp,
Natixis,
Goldman Sachs,
T Rowe Price,
Legg Mason.

Article extrait de la revue Faits & Documents – du 15 décembre 2011 au 15 janvier 2012.



Qu'est-ce que la richesse ?




Dessin :
Gérard Mathieu pour Alternatives économiques

jeudi, février 16, 2012

183 jours dans la barbarie ordinaire





Nicolas Sarkozy est au pouvoir depuis plus de deux années quand Marion Bergeron est embauchée par Pôle Emploi (CDD de 183 jours) et plonge dans la barbarie ordinaire.

25 ans, graphiste, étudiante chômeuse, free-lance, Marion est à l'image de la jeunesse française : énergique et motivée, mais trop jeune pour le marché du travail.

Au cœur de la crise qui explose, une jeune femme franchit la porte de Pôle Emploi, fraîchement embauchée par ce nouvel organisme qui se charge de l'indemnisation et du conseil des chômeurs. Plongée dans les entrailles du système, les deux mains dans la boue, elle raconte l'envers du décor. La violence de la misère. L'apprentissage de l'impuissance. Le naufrage d'une administration qui détruit, sans remords, ses usagers et son personnel. Prisonnière de son guichet d'accueil, méprisée et épuisée, elle raconte ce travail qui balaie sa vie privée, emporte ses principes et brûle ses dernières illusions. Ce livre n'est pas une compilation d'anecdotes. Ce n'est pas un ultime état des lieux du marché de l'emploi et de l'Administration française. C'est le récit de six mois de travail précaire. Une réalité crue, bouillonnante de souffrance et de désespoir. Bienvenue en enfer. Bienvenue à Pôle Emploi.

« ...La personne suivante n'arrive finalement pas. Et je peux recevoir mon troisième rendez-vous à l'heure. Je décide de laisser la trame d'entretien dans la corbeille et de tester sur le tas une nouvelle façon de procéder en commençant par demander à la jeune femme où elle en est. Mes rendez-vous d'aujourd'hui sont tous inscrits depuis deux mois, ils ont donc eu le temps de se confronter à leurs difficultés et de soulever de nouvelles interrogations. La jeune femme est venue avec son petit garçon. Il dort tranquillement dans son landau. Après son congé maternité, elle n'a pas pu reprendre son poste car elle n'a pas trouvé de garde pour son nouveau-né. Son employeur a fini parla licencier. Elle n'est pas un cas isolé. De nombreuses mamans se retrouvent dans cette situation. Il faudra l'expliquer à Rachida Dati, qui pointait fièrement sa silhouette de haricot vert au Conseil des ministres cinq jours après son accouchement, remettant ouvertement en cause le congé maternité. Le petit garçon commence d'ailleurs à se faire remarquer. Il gazouille, les yeux grands ouverts. Elle n'a pas de qualification. Elle faisait le ménage dans un hypermarché. Je lui crée son espace emploi. Elle n'a pas d'adresse mail. Je ne l'abonne pas aux offres, tant pis pour les chiffres de l'agence. Son petit garçon commence à s'impatienter. Elle m'explique que sa seule prétention concerne ses horaires de travail. Sa mère lui a offert de garder son petit le soir et le week-end pour lui permettre de retrouver un emploi. Je fais une rapide recherche sur le site. Et je trouve une offre. Une seule. Sur toute l'Île-de-France. Avec mon baratin sur pole-emploi.fr, la plus grande base d'offres en ligne du pays, j'ai l'air d'une cruche. Il s'agit d'assurer le service du dîner dans une maison de retraite. Aucun diplôme n'est demandé. Aucune expérience n'est exigée. Les horaires collent. Elle est toute contente et commence à me remercier lorsque je me rends compte qu'il s'agit d'une mission intérimaire de deux jours. Et qui n'a donc aucun intérêt. Je lui demande si elle souhaite quand même postuler, et son petit garçon se met à pleurer. Je jette l'offre à la corbeille et évoque la possibilité de postuler chez McDonald's, le roi de la flexibilité, qui propose des horaires de week-end et de soirée. À cette jeune femme qui doit assumer une vie de famille, je propose un travail que certains qualifient encore de job étudiant, et je l'expédie rapidement car son petit garçon me vrille les tympans. Elle repart sans abonnement aux offres et avec un espace emploi sur lequel elle ne retournera jamais pour la simple et bonne raison qu'elle ne sait pas se servir d'un ordinateur. Je n'ai même pas la curiosité d'aller consulter le montant de ses allocations. Je me doute bien qu'elle est en dessous du seuil de pauvreté.

Le suivant est un petit monsieur au visage tout rond. Il ne lit pas le français. Il est à des années-lumière du site pole-emploi.fr. Je laisse le pilote automatique prendre le contrôle : création d'espace, ouverture d'un compte mail, abonnement aux offres. Tout en sachant que c'est complètement ridicule. Mais je suis complètement démunie. Je n'ai rien à lui proposer. Je ne peux même pas l'orienter sur un accompagnement spécifique car je suis un faux conseiller, j'ignore s'il existe quelque chose qui correspond à ses besoins. Il doit attendre le mois prochain. Il doit attendre le suivi mensuel et son vrai conseiller. Je ne devrais pas remplir les objectifs de l'entretien. Je fais passer un pauvre bougre illettré pour un type branché qui fait ses courses sur Internet. Mais pour me donner une posture professionnelle, pour que personne ne puisse s'apercevoir que je pédale dans la choucroute, je n'ai rien trouvé de mieux que d'aller repêcher dans la corbeille la pathétique trame d'entretien approuvée par Pôle Emploi.

Je tente tout de même une action utile en recherchant des offres. Il est manœuvre pour le bâtiment. Une offre correspond. Le lieu de travail est juste à côté de chez lui. « Travaux de déblaiement, démolition, tranchées à effectuer à la pelle manuelle. Résistance physique. Travail de chantier. » C'est un recrutement pour une bête de somme. Mission intérimaire de quinze jours. SMIC horaire. Et il faut postuler par télécandidature. Ce qui signifie que tout se passe en ligne. À travers une succession d'écrans qui détaillent votre profil : expérience, formation, motivation, et qu'il faut remplir consciencieusement. La candidature parvient au conseiller responsable de l'offre. Qui la valide ou non en fonction de critères définis par l'employeur. Et vous invite, dans le cas d'une décision positive, à envoyer votre CV et votre lettre de motivation directement à l'employeur. Vous obligeant alors à refaire votre candidature, à l'envoyer à nouveau, et à attendre, encore, une réponse. Tout ce bazar pour quinze jours d'esclavage. Je renonce. C'est trop. De toute manière, mon petit monsieur est incapable de faire une télécandidature. Il n'a même pas de CV. Je ne peux d'ailleurs pas lui proposer de suivre un atelier CV. Ils sont réservés à ceux qui maîtrisent le français parlé, lu et écrit. Je ne sers à rien. Et le petit monsieur repart en me saluant gentiment.

Les deux derniers convoqués de la matinée ne se présentent pas. Je lambine une heure durant en les attendant. Le facteur va leur apporter un sympathique avertissement avant radiation. Qui est normalement généré automatiquement par DUO, notre logiciel interne. Mais comme ces entretiens sont tout nouveaux, ils n'existent pas dans DUO. Tout sera fait à la main, et je vais transmettre la liste des absents au Pôle Appui, le service secrétariat de l'agence, qui va rédiger les avertissements. Je suis tentée par ma bonne conscience de gauche de faire comme s'ils étaient tous venus. Mais je ne peux pas. Impossible d'afficher cent pour cent de présence, ce serait suspect. Et je ne veux pas. Je ne veux pas excuser ceux qui m'ont posé un lapin. Qui ont estimé que c'était sans importance et qu'il n'était pas nécessaire de me prévenir. Je les ai attendus. J'ai préparé les entretiens. J'ai épluché leurs dossiers. Je me suis renseignée sur leurs métiers. Je leur ai accordé mon temps et mon attention. Ils ont fait comme si je n'existais pas. Il ne leur reste plus qu'à se débrouiller pour justifier leur absence.

Mon déjeuner est un peu amer. Ces entretiens sont bidons. Parmi ceux que j'ai reçus aujourd'hui, aucun n'avait émis le désir d'être informé des services du site Internet. Il s'agit clairement d'un accompagnement imposé sans rapport avec les besoins de chacun, et donc, forcément, d'une perte de temps. C'est tout aussi stupide que si je convoquais cent personnes pour leur parler de la création d'entreprise sans qu'elles aient formulé le projet d'en créer une. De ce point de vue, je peux comprendre que l'on ne se présente pas. Parce que c'est humiliant, finalement, de se déplacer pour passer une demi-heure à écouter le soliloque d'un conseiller au seul prétexte que l'on est sans emploi. Et c'est là tout le problème de ce nouvel entretien qui, quoi qu'on en dise, relève de la même logique que le tristement célèbre SMP.

Le Suivi Mensuel Personnalisé. Le 5 juillet 2005, Dominique de Villepin, alors Premier ministre, venait discourir devant les cadres de la regrettée ANPE de la priorité d'apporter des réponses au chômage. Convaincu que l'ANPE avait « la capacité de faire mieux, de faire plus, et surtout de faire plus vite », notre cher Dominique avait concocté tout un catalogue de « moyens appropriés et mieux gradués afin de faire respecter les obligations des demandeurs d'emploi ». Le décret d'application allait suivre. Les entretiens obligatoires avaient auparavant lieu tout les six mois, il y en aurait dès lors un par mois. Le Suivi Mensuel Personnalisé était né. Dans la douleur. Les syndicats et les associations de chômeurs s'étaient mobilisés contre la nouvelle machine à radier. En vain.

Si le principe du suivi mensuel peut paraître louable, apporter une aide plus régulière semble aller dans le bon sens, il n'en est pas moins une vaste fumisterie. La logique est toute mathématique. Les convocations génèrent des absences. Les absences, des radiations. Plus de convocations entraînent plus d'absences. Donc plus de radiations. Donc moins de chômeurs au compteur. Et Dominique a la joie d'annoncer une baisse du chômage à Noël. Un sujet qui le préoccupait d'ailleurs beaucoup et dont il s'était confié aux cadres de l'ANPE avec une vive émotion : «Il faut que les résultats de cet engagement puissent être vus rapidement par nos compatriotes. » Pour un peu, nous verserions même une petite larme devant tant d'abnégation. Mais la logique de la radiation ne s'est pas cantonnée à une simple épuration statistique. La teneur même du métier de conseiller s'en est retrouvée altérée. Devant la nouvelle charge de travail générée par la multiplication des rendez-vous, les conseillers ont vite été débordés. Et je travaille aujourd'hui dans une agence où il est presque impossible d'être reçu par son conseiller en dehors du SMP, où mes collègues ont du pain par-dessus la planche et pas une minute pour approfondir un cas. Où les entretiens sont le plus souvent des coquilles vides qui se succèdent à des cadences infernales. Et où il n'est plus question que de faire le point, toute action à long terme étant inimaginable. Ceux qui ont besoin d'un vrai coup de main sont traités sur le même mode que ceux qui sont parfaitement autonomes et qui ne trouvent pas d'emploi pour la seule et unique raison qu'il n'y en a pas. Vous ne pouvez plus débarquer dans votre agence et demander de l'aide pour répondre à une offre précise ou vous entraîner pour votre entretien d'embauche. Les conseillers n'ont plus une minute pour vous recevoir au débotté. Si le suivi est bien devenu mensuel, il n'est pas du tout personnalisé. Dans la bataille entre la quantité et la qualité, c'est la quantité qui a décroché le pompon. Les demandeurs finissent par ne plus vouloir se plier à cette mascarade Ils ne viennent pas à nos convocations de pacotille. Ils ont peut-être raison. »

Marion Bergeron, 183 jours dans la barbarie ordinaire.


183 jours dans la barbarie ordinaire



Dessin :

mardi, février 14, 2012

No Brain Inside





Dans La fabrication du consentement, Noam Chomsky et Edward Herman écrivent :

« Des années de recherches consacrées aux médias nous ont convaincus que les médias sont utilisés pour mobiliser un vaste soutien aux intérêts particuliers qui dominent les sphères de l'État et le secteur privé. Leurs choix de mettre en avant un sujet ou d'en occulter d'autres s'expliquent souvent beaucoup mieux dans un tel cadre d'analyse, et dans certains cas avec la force de l'évidence. Il n'aura échappé à personne que le postulat démocratique affirme que les médias sont indépendants, déterminés à découvrir la vérité et à la faire connaître ; et non qu'ils passent le plus clair de leur temps à donner l'image d'un monde tel que les puissants souhaitent que nous nous le représentions. Ceux qui dirigent les médias crient haut et fort que leurs choix éditoriaux sont fondés sur des critères impartiaux, professionnels et objectifs — ce que cautionnent les intellectuels. Mais s'il s'avère effectivement que les puissants sont en position d'imposer la trame des discours, de décider ce que le bon peuple a le droit de voir d'entendre ou de penser, et de « gérer » l'opinion à coups de campagnes de propagande, l'idée communément acceptée du fonctionnement du système n'a alors plus grand-chose à voir avec la réalité. »

Ils concluent leur livre ainsi :

« Dans notre conclusion à la première édition, nous insistions sur le fait suivant : dès lors que les aspects les plus négatifs de l'attitude des médias résultent principalement de leur structure même et de leurs objectifs, toute évolution réelle repose sur des changements de l'organisation qui les sous-tend et de ses objectifs. Les changements structurels survenus depuis 1988 n'ont certainement pas été de nature à améliorer l'attitude des médias. Il n'en demeure pas moins fondamental que la mise en place de politiques démocratiques passe nécessairement par une démocratisation des sources d'information, et par la création de médias plus démocratiques. Tout en s'efforçant de freiner, voire d'inverser la concentration croissante des médias les plus influents, les mouvements de base et intermédiaires qui représentent en très grand nombre les citoyens ordinaires devraient s'investir beaucoup plus activement et financièrement dans la création et le développement de leurs propres médias — tout comme ils sont parvenus à le faire avec les centres de médias indépendants crées ex nihilo lors des manifestations de Seattle et Washington. Ce type de structures et de stations de TV et radio-diffusion associatives et à but non lucratif, ainsi qu'un meilleur usage de l'audiovisuel public, d'Internet, et de l'édition indépendante sont des outils indispensables pour qui veut prétendre à de réelles conquêtes démocratiques, sociales et politiques. »

Le créateur de No Brain Inside participe à sa façon à la démocratisation des sources d'information souhaitée par Chomsky et Herman.

No Brain Inside


« Journal parodique de l'actualité, écrit son créateur, No Brain Inside est une émulation artistique dénuée d'intelligence, en respectant ce dogme, j'ai voulu créer un journal d'information qui en soit la marque de fabrique ( si c'est intelligent on a pas fait exprès, désolé), son coté parodique me permet (nous) de toucher là où la main de l'homme n'a jamais mis de vase Aline...

Il nous reste que l'humour alors autant s'en servir pour dire aussi... Non ?

Vous pouvez nous retrouver par ici :
http://www.yergla.com/blog/2012/02/13/nobraininside-news-le-journal-de-fevrier/

Et tout bientôt par là:
http://www.nobraininside.fr/


La fabrication du consentement 

Les médias constituent un système qui sert à communiquer des messages et des symboles à la population. Ils ont vocation à distraire, amuser, informer, et à inculquer aux individus les croyances et codes comportementaux qui les intégreront aux structures sociales au sens large. Dans un monde où les richesses sont fortement concentrées et où les intérêts de classe entrent en conflit, accomplir cette intégration nécessite une propagande systématique.

Une modélisation de la propagande se focalise sur la prodigieuse inégalité dans la capacité de contrôle des moyens de production ; et ce qu'elle implique tant du point de vue de l'accès à un système de médias privés que de leurs choix et fonctionnements. Le modèle permet de reconstituer par quels processus le pouvoir et l'argent sélectionnent les informations.

 


Economiste, Edward S. Herman est professeur émérite à la Wharton School of Business (Pennsylvanie), Co-fondateur de Znet, réseau américain d'informations alternatif, il s'intéresse notamment à la domination industrielle et aux réglementations financières relevant des conflits d'intérêts.

Linguiste, Noam Chomsky est professeur émérite au Massachusetts Institute of Technology (MIT, Boston). Parallèlement à sa prestigieuse carrière universitaire, il est mondialement connu pour son engagement politique et sa critique de la politique étrangère des États-Unis.


dimanche, février 12, 2012

L'idéal libertaire




"L'anarchie est la plus haute expression de l'ordre."


"Penser, parler, agir librement" en toutes choses ! L'idéal de la société future, en contraste et cependant en continuation de la société actuelle, se précise donc de la manière la plus nette. Penser librement ! Du coup l'évolutionniste, devenu révolutionnaire, se sépare de toute église dogmatique, de tout corps statutaire, de tout groupement politique à clauses obligatoires, de toute association, publique ou secrète dans laquelle le sociétaire doit commencer par accepter, sous peine de trahison, des mots d'ordre incontestés. Plus de papes pour mettre les écrits à l'index ! Plus de rois ni de princes pour demander un serment d'allégeance, ni de chef d'armée pour exiger la fidélité au drapeau; plus de ministre de l'Instruction publique pour dicter des enseignements, pour désigner jusqu'aux passages des livres que l'instituteur devra expliquer. Plus de juges pour forcer un témoin à prêter un serment ridicule et faux, impliquant de toute nécessité un parjure par le fait même que le serment est lui-même un mensonge. Plus de chefs, de quelque nature que ce soit, fonctionnaire, instituteur, patron ou père de famille, pour s'imposer en maître auquel l'obéissance est due.

Et la liberté de parole ? Et la liberté d'action ? Ne sont-ce pas là des conséquences directes et logiques de la liberté de penser ? La parole n'est que la pensée devenue sonore, l'acte n'est que la pensée devenue visible. Notre idéal comporte donc pour tout homme la pleine et absolue liberté d'exprimer sa pensée en toutes choses, science, politique, morale, sans autre réserve que celle de son respect pour autrui ; il comporte également pour chacun le droit d'agir à son gré, de « faire ce qu'il veut », tout en associant naturellement sa volonté à celle des autres hommes dans toutes les œuvres collectives : sa liberté propre propre ne se trouve point limitée par cette union, mais elle grandit au contraire, grâce à la force de la volonté commune.

Elisée Reclus

Elisée Reclus


Géographe, théoricien du mouvement libertaire et militant anarchiste. Issue d'une famille protestante, Élisée Reclus (1830-1905) fait des études de géographe.

En 1871, il prend une part active à la Commune de Paris. Arrêté les armes à la main, il est condamné à la déportation en Nouvelle Calédonie. Sa peine sera commuée à dix ans de bannissement. Il rejoint alors son frère Élie en Suisse, et participe activement à la Fédération Jurassienne, avec Bakounine et James Guillaume, puis Pierre Kropotkine.

Après la Suisse, c'est en Belgique qu'Élisée Reclus s'installe. Très actif, c'est sous son impulsion qu'une Université Nouvelle est créé, ainsi qu'un Institut des Hautes Études dans lequel il enseignera.

Auteur prolifique, Élisée Reclus a participé à de nombreuses revues, brochures et journaux. Mais il est surtout l'auteur de l'extraordinaire "Géographie Universelle" (19 volumes), et de "L'Homme et la Terre" (6 volumes).

« Mais là où la pratique anarchiste triomphe, c’est dans le cours ordinaire de la vie, parmi les gens du populaire, qui certainement ne pourraient soutenir la terrible lutte de l’existence s’ils ne s’entraidaient spontanément, ignorant les différences et les rivalités des intérêts ».


samedi, février 11, 2012

Washington la nouvelle Jérusalem





« La religion civile américaine a ses « écritures sacrées » : la Déclarations d'indépendance et la Constitution, protégées et vénérées comme les Tables de la Loi ; elle a ses prophètes, comme les Pères Pèlerins ; elle célèbre ses héros sanctifiés, comme George Washington, le « Moïse américain », qui a libéré de l'esclavage anglais le « nouveau peuple d'Israël », c’est-à-dire les Américains des colonies, et l'a guidé vers la Terre promise de la liberté, de l'indépendance et de la démocratie ; elle vénère ses martyrs, tel Abraham Lincoln, victime sacrificielle assassinée le Vendredi saint de 1865, tandis que la nation américaine était en proie au feu régénérateur d’une cruelle guerre civile pour expier ses fautes et consacrer à nouveau son unité et sa mission. »



Pour beaucoup d'Américains, Washington est la Nouvelle Jérusalem. Et « The House of the Temple », le siège du Suprême Conseil de la franc-maçonnerie (rite écossais ancien et accepté, REAA), est le nouveau Temple de Salomon édifié sur Hérédom, le « mont » sacré des francs-maçons.

Hérédom

Hérédom est un « mot mystérieux, presque « magique » de la tradition maçonnique, le mot « Hérédom » est aussi l'un des plus difficiles à élucider. Son étymologie et donc sa signification essentielle sont l'objet de controverses : en fait personne ne peut rien avancer de certain.

Une hypothèse fréquente y voit la déformation d'un mot hébreu, harodim. On semble qualifier ainsi, dans la Bible, les « surveillants » ou les « contremaîtres » des travaux du Temple de Salomon (I Rois, 5, 16). Mais il pourrait aussi s'agir d'une allusion aux termes latins haeres (= hériter) ou haeredom (= héritage).

Toujours est-il que vers le milieu du XVIIIe siècle, un ordre maçonnique dénommé Ordre Royal d'Heredom de Kilwinning, prolongeait une légende qui faisait d'Hérédom une montagne sacrée d'Écosse - non identifiée à ce jour -, lieu mythique où la franc-maçonnerie était née...

Dans la pratique maçonnique anglo-saxonne, un grade important du REAA, celui de Rose-Croix (18e grade) est dit « Rose-Croix d'Hérédom ». Du reste, la revue d'études maçon-niques du REAA aux États-Unis, parmi les plus prestigieuses se nomme simplement Heredom.

Tel le mont Salvat, Hérédom est un lieu mythique où les légendes maçonniques ont concentré la pure essence des révélations mystiques de la maçonnerie. Le fait de localiser Hérédom à Washington et le « Mont » à l'endroit de la Maison de Temple témoigne bien de la conviction d'un certain nombre d'Américains - et pas seulement des francs-maçons : les États-Unis sont une nouvelle Terre Sainte et Washington une nouvelle Jérusalem. « Heredom » est son surnom maçonnique, en quelque sorte.

La leçon majeure du Symbole perdu (du roman de Dan Brown) semble être là : Washington, au cœur de l'Amérique, est un rébus sacré. À l'instar des deux sphinx qui ornent l'entrée de la Maison du Temple, il délivre un message secret : à celui qui le décryptera, appartiendra le monde... »
Alain Bauer et Roger Dachez, Le Symbole Perdu décodé.


Le Symbole Perdu décodé

L’intrigue du roman de Dan Brown Le Symbole perdu (5 millions d’exemplaires aux USA) se déroule à Washington, qui, dans son urbanisme et son architecture est fortement imprégnée de symboles maçonniques. L’intrigue du roman se déroule sur douze heures et explore les secrets de la franc-maçonnerie américaine. Robert Langdon y croise des personnages louches dont un certain Mal’akh, nouvellement initié, et à la recherche d’un secret qui lui procurerait un pouvoir immense s’il le trouvait. Celui-ci est caché dans Washington…


Seuls de véritables spécialistes, à la fois de la franc-maçonnerie américaine et des enquêtes policières, sont à même de décoder les arcanes du roman de Dan Brown. Alain Bauer et Roger Dachez sont ceux-là.

Mettant leurs compétences complémentaires au service de ce décodage, ils nous entraînent dans les arcanes de la franc-maçonnerie américaine et de son histoire, dans le labyrinthe du Washington maçonnique qu’ils explicitent, et explorent les problèmes de cryptologie qui tiennent un grand rôle dans le Symbole Perdu.


Photos

Ci-dessus :
http://solvedcases.free.fr/index/Livres/Dan_Brown/Le_Symbole_Perdu/symbole_perdu_en_dix_questions.html

Ci-dessous, deux francs-maçons posent avec un portrait d'Albert Pike situé en face du sphinx "Sagesse" à la Maison du Temple.
La fausse lettre de Pike à Mazzini révélant le plan luciférien de gouvernement mondial est commentée par de nombreux conspirationnistes.




Chacun est un éveillé qui s’ignore

Le buffle représente notre nature propre, la nature de l’éveil,  la nature de Buddha, l’Ainsité (et la vacuité) Le Chemin de l’Eveil Le dres...