jeudi, avril 28, 2011

La transformation de transfert de P'ou-houa




P'ou-houa, écrit Paul Demiéville, un moine aux comportement extravagant qui secoua Lin-tsi lorsque celui-ci vint s'installer dans le Nord-Est. […] Il passe pour avoir appartenu à la lignée de Tao-yi dit Ma-tsou, de même que Lin-tsi. Son nom signifie « conversion universelle » et lui aurait été donné parce qu'il agitait sa clochette pour tout le monde, sans distinction de rang haut ou bas. […] Sans cesse P'ou-houa, dans les marchés des rues, agitait une clochette en disant :

« Pour qui vient dans l'obscurité, je la bats dans l'obscurité ; pour qui vient dans la clarté, je la bats dans la clarté. Pour qui vient des dix directions et des huit côtés, je la bats en trombe ; pour qui vient du vide et de l'espace, je la bats en fléau à faisceau. »

Les circonstances miraculeuses de la mort de P'ou-houa

Un jour, au marché de la rue, P'ou-houa mendiait aux gens un vêtement cousu d'un seul tenant. Tout le monde lui en donnait, mais il n'en voulut aucun. Le maître dit à l'administrateur du monastère de lui acheter un cercueil. Lorsque P'ou-houa s'en revint, le maître dit :

« Je t'ai fait faire un vêtement cousu d'un seul tenant. »
Alors P'ou-houa le chargea sur son épaule et fit le tour du marché de la rue, criant :

« Lin-tsi m'a fait faire un vêtement cousu d'un seul tenant. Je m'en vais à la porte de l'Est pour ma transformation de transfert. » Les gens du marché le suivirent à l'envi, pour regarder. P'ou-houa dit :

« Ce n'est pas encore pour aujourd'hui. Demain j'irai à la porte du Sud pour ma transformation de transfert. »

Et ainsi pendant trois jours. Le quatrième jour, sans personne pour le suivre et regarder, il sortit tout seul hors des murs et entra lui-même dans le cercueil, requérant un passant pour le clouer. Aussitôt la nouvelle se répandit, et les gens du marché allèrent à l'envi ouvrir le cercueil. Ils virent qu'il avait disparu en se dépouillant de son corps intact, et ils n'entendirent qu'un bruit de clochette, dans les airs, qui s'en allait obscurément.

Notes de Paul Demiéville :

Un vêtement cousu d'un seul tenant : bâti d'une seule pièce. Apparemment un linceul - mais Lin-tsi comprend l'allusion : il lui offre un cercueil.

Transformation de transfert : ts'ien-houa, la mort en terminologie taoïste (et aussi confucianiste). Les bouddhistes ont emprunté ce terme et ont même voulu interpréter le mot houa au sens de conversion ! l'œuvre de conversion se prolongeant dans l'autre monde après la mort...

En se dépouillant de son corps intact : comme la cigale qui se transforme en abandonnant sa dépouille. C'est ainsi que meurent les immortels taoïstes, qui montent au ciel en laissant leur dépouille. Mais celle-ci, dans le taoïsme, n'est en général qu'un objet leur ayant appartenu, une épée, une canne, des sandales (dans le cercueil de Bodhidharma, on trouva une seule sandale), non pas le corps lui-même qui est immortalisé au ciel. Le cas de P'ou-houa rappelle celui du thaumaturge, mi-bouddhiste mi-taoïste, Chan Tao-k'ai qui, sous les Tsin Orientaux, en 359, mourut « en se dépouillant comme une cigale » sur le mont Lo-feou, près de Canton, où l'on trouva son corps intact auquel on rendit un culte comme à une momie.

Le mot t'o, « se dépouiller ››, a été emprunté par les bouddhistes pour rendre la notion de délivrance (vimoksha).

Photo :
Boîte de laque (fin du XVIIIe siècle) représentant les Huit Immortels, chacun tenant son attribut distinctif. 

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Monter au ciel en plein jour

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Trois lamas du temple Kagyu Ling sur le banc des accusés


Une femme de 56 ans accuse trois lamas du temple Kagyu Ling d’avoir abusé de sa vulnérabilité psychologique. Des manipulations qui pourraient être d’ordre financier... LIRE LA SUITE :

http://www.lejsl.com/fr/permalien/article/5001796/Sur-le-banc-des-accuses.html?





Les Trois lamas incriminés dans cette affaire appartiennent à l'école de Kalou Rinpoché. Kalou était un important hiérarque du lamaïsme qui n'hésitait pas à recourir à la manipulation pour assouvir ses pulsions sexuelles.



Kalou Rinpoché & June Campbell


"June Campbell « a raconté son histoire dans un très beau livre paru en 1996 (relié) et réédité en 2002 (broché) sous le titre Traveller in Space: Gender, Identity and Tibetan Buddhism [Voyageur de l’espace : sexe, identité et bouddhisme tibétain], Athlone Press.

Elle était l'interprète du très regretté Kalou Rinpoché. Ce moine est sans doute l'un des plus vénérés du tantrisme bouddhique. Étant directement à son service, elle ne souffrait pas de la pression des échelons intermédiaires souvent très perceptible et dérangeante dans ces écoles. Elle était donc dans des conditions parfaites pour faire un beau voyage spirituel au service de ce très digne moine. Cependant, il lui fallut, raconte-t-elle dans son livre paru en anglais, accepter les relations sexuelles que le maître exigea d'elle (il était un "chaste" moine portant la robe et visiblement astreint à leurs vœux), puis les relations sexuelles avec l'un de ses proches, un parent à lui, c'est à dire sans doute une forme simple de la polyandrie répandue dans les cultures himalayennes. Enfin une deuxième maîtresse beaucoup plus jeune fut introduite dans cette intimité des deux hommes et June dut accepter la nouvelle venue (qui mourut d'ailleurs prématurément). A l'issue de l'expérience, c'est à dire après la mort du vénérable, June mit je crois près de quatorze années avant de pouvoir se résoudre à raconter son histoire. Et ce n'est pas un merveilleux voyage qu'elle raconte, mais l'histoire d'un douloureux secret. Les deux hommes ayant exigé d'elle l'absolu secret sur ces relations qui auraient terni l'image du maître si elles étaient venues à la connaissance des disciples, June se sentit selon ses mots "abused", abusée, et mit longtemps pour se reconstruire."

Marc BOSCHE


Traveller in Space: Gender,

Identity and Tibetan Buddhism


mardi, avril 26, 2011

La Psychanalyse, une théorie zéro




Pour le philosophe Mikkel Borch-Jacobsen, l'immense succès de la psychanalyse, malgré la révélation des impasses et des mensonges, vient de ce qu'elle est une théorie « zéro », une nébuleuse en perpétuelle mouvement dans laquelle chacun peut lire ce qu'il veut.

« Pourquoi la psychanalyse a-t-elle eu un tel succès ? » Il y a plusieurs réponses possibles à cette question. Si vous interrogez un défenseur de la psychanalyse, comme le philosophe Thomas Nagel par exemple, il vous dira que c'est tout bonnement parce que Freud était dans le vrai. Comment expliquer, sinon, que ses théories aient eu un tel impact sur la culture occidentale, de la psychiatrie à la pédagogie en passant par la sexologie, la philosophie, les arts et la littérature ? L'argument est massif, mais il est aussi parfaitement creux. Si la validité d'une théorie se mesurait à l'aune de son succès culturel, nous devrions compter les diverses religions parmi les théories scientifiques. Même s'il est vrai, en pratique, que c'est l'accord entre experts qui nous fait dire qu'une théorie est vraie, il reste que le consensus ne fournit pas en lui-même la preuve de sa validité, et c'est ce qui apparaît immédiatement dans les cas où ce consensus s'effrite ou s'effondre.

Or c'est précisément ce qui se passe aujourd'hui : le consensus ne tient plus. Nous ne nous demanderions pas pourquoi la psychanalyse a eu un tel succès si nous étions persuadés de sa validité. En réalité, la question suggère implicitement que nous n'y croyons pas, ou que nous
n'y croyons plus : « Comment expliquer qu'une théorie fausse comme la psychanalyse ait eu un tel succès ? » Autrement dit : « Comment avons-nous pu nous tromper à ce point ? »

Les raisons de notre erreur

Première réponse qui vient à l'esprit : c'est parce que nous avons été trompés. On incrimine alors le Grand Menteur qui manipulait ses données cliniques et claironnait des succès inexistants, ou encore le Grand Rhéteur qui est parvenu à nous faire prendre des vessies pour des lanternes et l'inconscient pour une réalité psychique. Le problème avec cette réponse, c'est qu'elle échoue à expliquer pourquoi tant de gens continuent à accorder créance aux théories freudiennes alors même que celles-ci ont été déconsidérées. Cela fait en effet longtemps que les incohérences de la légende freudienne ont été mises en évidence, mais cela n'a pas empêché pour autant psychanalystes et intellectuels d'en réciter les éléments comme si de rien n'était, avec une volonté d'ignorance tout à fait sidérante.

Il est tentant alors de se tourner vers telle ou telle explication psychologique ou sociologique. On dira que la psychanalyse, si erronée soit-elle, a répondu (et répond encore) à de très profonds besoins : le besoin, par exemple, de trouver un substitut aux solides certitudes de la religion ; le besoin de donner un sens au mal-être et à l'angoisse existentielle dans un monde déserté par Dieu ; le besoin d'une théorie justifiant la libération sexuelle à l'époque du déclin de la famille nucléaire et de l'autorité paternelle-masculine. On dira encore que la montée de la psychanalyse au début du XXe siècle a correspondu à la propagation du darwinisme, ou bien qu'elle a fourni une idéologie à la société capitaliste et à l'individualisme moderne, ou bien qu'elle a servi de refuge aux déçus du marxisme lorsque celui-ci s'est effondré.

Une théorie vide

Pourquoi pas, en effet ? Toutes ces explications sont sans doute valables. Reste toutefois à comprendre comment il se fait qu'elles soient toutes valables. Comment la psychanalyse a-t-elle pu répondre à des besoins aussi divers et contradictoires ? Qu'y a-t-il dans la théorie psychanalytique qui la rende capable de remplir tant de fonctions ? Rien, à mon sens : c'est précisément parce qu'elle est parfaitement vide, parfaitement creuse, que cette théorie a pu se propager comme elle l'a fait et s'adapter à des contextes si différents. On fait fausse route lorsqu'on se demande ce qui, dans la psychanalyse, explique son succès, car il n'y a jamais rien eu de tel que la psychanalyse, si du moins on entend par là un corps de doctrine cohérent, organisé autour de thèses clairement définies et par conséquent potentiellement réfutables. La psychanalyse n'existe pas - c'est une nébuleuse sans consistance, une cible en perpétuel mouvement. Qu'y a-t-il de commun entre les théories de Freud et celles de Rank, de Ferenczi, de Reich, de Melanie Klein, de Karen Horney, d'Imre Hermann, de Winnicot, de Bion, de Bowlby, de Kohut, de Lacan, de Laplanche, d'André Green, de Slavoj Zizek, de Julia Kristeva, de Juliet Mitchell ? Mieux encore, qu'y a-t-il de commun entre la théorie de l'hystérie professée par Freud en 1895, la théorie de la séduction des années 1896-1897, la théorie de la sexualité des années 1900, la seconde théorie des pulsions de 1914, la seconde topique et la troisième théorie des pulsions des années 1920 ? Il suffit de consulter n'importe quel article du Dictionnaire de la psychanalyse de Laplanche et Pontalis pour se rendre compte que la « psychanalyse » a dès le départ été une théorie en renouvellement (ou en flottement) permanent, capable de prendre les virages les plus inattendus.

La seule chose qui soit restée constante, c'est l'affirmation de l'inconscient, couplée avec la prétention des psychanalystes à en interpréter les messages. Les deux vont ensemble. L'inconscient, par définition, ne se présente jamais à la conscience, et nous ne pouvons donc le connaître, comme l'explique Freud, qu'une fois qu'il a été « traduit » ; en conscient. Or comment s'opère cette « traduction » ? Uniquement grâce aux interprétations de l'analyste qui dit qu'il y a quelque chose à traduire là où les principaux intéressés n'en savent rien. L'analyste peut par conséquent faire dire à l'inconscient ce qu'il veut, sans craindre d'être démenti puisque l'inconscient ne parle jamais qu'à travers lui (et que le témoignage des patients, quant à lui, est disqualifié comme « résistance »). De là les multiples conflits d'interprétation qui ont immédiatement surgi entre les premiers psychanalystes : là où Freud disait « Œdipe », d'autres disaient « Électre » ; là où il disait. « libido », d'autres disaient « pulsion d'agression » ou « infériorité d'organe » ; là où il disait «complexe paternel », d'autres disaient. « complexe maternel » ou « traumatisme de la naissance ».

Or comment décider qui avait raison, qui était le traducteur autorisé de l'inconscient ? Rien ne permettant de choisir entre les interprétations divergentes, la seule façon de trancher le débat a été l'argument d'autorité, institutionnalisé sous la forme de l'analyse didactique : en psychanalyse, est
vrai ce que l'Association psychanalytique internationale ou n'importe quelle autre école de psychanalyse décide de considérer comme tel à un moment donné. C'est évidemment fort peu satisfaisant d'un point de vue épistémologique, et les philosophes des sciences ont eu beau jeu de souligner le caractère complètement inconsistant, parce que « infalsifiable », des théories psychanalytiques. La psychanalyse est proprement irréfutable car elle peut dire tout et son contraire - il lui suffit pour cela d'invoquer l'obligeant « témoignage » de l'inconscient, toujours prêt à se plier aux exigences du moment.

Les « progrès » de la psychanalyse

Or tout cela, qui signe le caractère pseudo-scientifique de la psychanalyse aux yeux d'un falsificationniste comme Popper, est justement la raison de son incroyable succès. La théorie psychanalytique étant parfaitement vide, elle est aussi, du même coup, suprêmement adaptable. Tel ou tel aspect de la théorie s'avère-t-il difficilement défendable, voire franchement embarrassant, comme le lien établi par Freud entre neurasthénie et masturbation, par exemple, ou l'« envie de pénis » censée régir la sexualité féminine, ou le caractère de « perversion » de l'homosexualité ? Eh bien, il suffit de le laisser tomber silencieusement et de sortir un nouveau lapin théorique de l'inépuisable chapeau de l'inconscient. C'est ce que les psychanalystes aiment à décrire comme les « progrès » de la psychanalyse, comme si chaque analyste explorait plus avant le continent inconscient, en rectifiant les erreurs de ses prédécesseurs. En fait, chaque école de psychanalyse a sa propre idée de ce qu'est le progrès, vigoureusement contestée par les autres, et c'est en vain qu'on chercherait dans ces disputes un quelconque développement cumulatif. De ce point de vue, rien n'a changé depuis les monumentales batailles entre Freud et Adler, Jung, Stekel, Rank, Melanie Klein ou Ferenczi. Ce qui est donné comme un progrès-de-la-psychanalyse n'est jamais que la dernière interprétation en date, c'est-à-dire la plus acceptable dans un contexte institutionnel, historique et culturel donné.

Mais c'est aussi ce qui permet à la psychanalyse de rebondir chaque fois et de creuser sa petite « niche écologique », comme dit Ian Hacking, dans les environnements les plus divers. N 'étant rien en particulier, elle peut tout envahir. La psychanalyse est comme le « symbole zéro » dont parle Lévi-Strauss : c'est un « truc », un « machin » qui peut servira désigner n'importe quoi, une théorie vide dans laquelle il est loisible de fourrer ce qu'on veut. On objectait de toutes parts à Freud son insistance unilatérale sur la sexualité ? Qu'à cela ne tienne, il a développé la théorie du narcissisme et l'analyse du moi, en empruntant silencieusement à certains de ses critiques (Jung, Adler). Les névroses traumatiques de la guerre de 1914-1918 avaient montré qu'on pouvait souffrir de symptômes hystériques pour des raisons non sexuelles ? Freud a immédiatement sorti de son chapeau la théorie de la compulsion de répétition et de la pulsion de mort. On loue souvent Freud d'avoir su changer ses théories lorsqu'il s'avisait qu'elles étaient invalidées par les faits (Clark Glymour, Adolf Grünbaum), mais on confond rigueur falsificationniste et opportunisme théorique. Aucun « fait » n'était susceptible de réfuter les théories de Freud, il adaptait seulement celles-ci aux objections qui lui étaient faites.

On retrouve le même opportunisme chez ses successeurs. Lorsque les émigrés viennois sont arrivés aux États-Unis, la première chose qu'ils ont faite a été d'amender la doctrine en promouvant une « ego psychology » compatible avec la psychologie développementale de l'époque. Inversement, lorsque le positivisme de Freud s'est avéré difficile à vendre auprès d'un public européen imbu de phénoménologie et de dialectique, les partisans de la réforme « herméneutique » de la psychanalyse (Habermas, Ricœur) ont décidé qu'il s'agissait d'une « auto-mécompréhension scientiste » de sa part, qu'il suffisait simplement de rectifier. Lacan, de même, a laissé tomber le biologisme freudien au profit d'un concept de « désir » entendu comme pure négativité, bien fait pour plaire aux lecteurs d'Alexandre Kojève et aux « existentialistes » des années 1950, après quoi il a mixé cela aux théories de Saussure et de Lévi-Strauss lorsque le structuralisme a envahi les sciences humaines. De nos jours, les narrativistes américains ne croient plus à la « vérité historique » de ce que leur racontent leurs patients, car ils sont devenus résolument postmodernes et ne jurent plus que par les récits et la « vérité narrative ». Leurs collègues « thérapeutes de la mémoire retrouvée », par contre, retournent à la vieille théorie de la séduction du fondateur et exhument chez leurs patients des souvenirs d'abus sexuel infantile parfaitement conformes aux prédictions des féministes américaines radicales des années 1980. Quant aux plus malins, ils esquissent à présent un rapprochement entre psychanalyse et neurosciences, afin de ne pas rater le coche du XXIe siècle.

Quoi d'étonnant, dans ces conditions, si la psychanalyse recrute toujours autant de patients et d'alliés ? C'est qu'elle fait dire à l'inconscient ce que chacune de ses clientèles veut bien entendre, en créant chaque fois un petit univers thérapeutique où l'offre correspond exactement à la demande. Qu'il y ait autant d'univers de cette sorte que de demandes, cela n'est aucunement dérangeant pour la psychanalyse car c'est justement ainsi qu'elle se propage et survit à sa propre inconsistance théorique. Voilà le grand secret du succès de la psychanalyse, que la légende freudienne a si longtemps caché : il n'y a jamais eu la « psychanalyse », seulement une myriade de conversations thérapeutiques aussi diverses que leurs participants. La psychanalyse, c'est très exactement tout et n'importe quoi - tout parce que n'importe quoi.

Mikkel Borch-Jacobsen, « Le livre noir de la psychanalyse ».
Propos recueillis par Catherine Meyer.

 Le livre noir de la psychanalyse
La France est - avec l’Argentine- le pays le plus freudien du monde. A l’étranger, la psychanalyse est devenue marginale.
Quarante auteurs parmi les meilleurs spécialistes du monde ouvrent un débat nécessaire. Pourquoi refuser en France le bilan critique que tant d’autres nations ont dressé avant nous ? 
Le livre noir de la psychanalyse dresse le bilan d’un siècle de freudisme. Un ouvrage international de référence pour tous ceux qui s’intéressent à l’humain et au psychisme.


Catherine Meyer est ancienne élève de L'Ecole normale supérieure. Mikkel Borch-Jacobsen est philosophe, historien de la psychanalyse et professeur à l'Université de Washington. Jean Cottraux, psychiatre honoraire des Hôpitaux, et chargé de cours à l'Université Lyon 1. Didier Pleux, docteur en psychologie, directeur de l'Institut français de thérapie cognitive. Jacques Van Rillaer, professeur émérite de psychologie de l'Université de Louvain-la-Neuve, Belgique.

Les méfaits de la psychanalyse :



lundi, avril 25, 2011

Les méfaits de la psychanalyse




par René Guénon

Si de la philosophie nous passons à la psychologie, nous constatons que les mêmes tendances y apparaissent, dans les écoles les plus récentes, sous un aspect bien plus dangereux encore car, au lieu de ne se traduire que par de simples vues théoriques, elles y trouvent une application pratique d’un caractère fort inquiétant ; les plus «représentatives» de ces méthodes nouvelles, au point de vue où nous nous plaçons, sont celles qu’on connaît sous la désignation générale de «psychanalyse». Il est d’ailleurs à remarquer que, par une étrange incohérence, ce maniement d’éléments qui appartiennent incontestablement à l’ordre subtil continue cependant à s’accompagner, chez beaucoup de psychologues, d’une attitude matérialiste due sans doute à leur éducation antérieure et aussi à l’ignorance où ils sont de la véritable nature de ces éléments qu’ils mettent en jeu ; un des caractères les plus singuliers de la science moderne n’est-il pas de ne jamais savoir exactement à quoi elle a affaire en réalité, même quand il s’agit simplement des forces du domaine corporel ? Il va de soi, d’ailleurs, qu’une certaine «psychologie de laboratoire», aboutissement du processus de limitation et de matérialisation dans lequel la psychologie «philosophico-littéraire» de l’enseignement universitaire ne représentait qu’un stade moins avancé, et qui n’est plus réellement qu’une sorte de branche accessoire de la physiologie, coexiste toujours avec les théories et les méthodes nouvelles; et c’est à celle-là que s’applique ce que nous avons dit précédemment des tentatives faites pour réduire la psychologie elle-même à une science quantitative.
Il y a certainement bien plus qu’une simple question de vocabulaire dans le fait, très significatif en lui-même, que la psychologie actuelle n’envisage jamais que le «subconscient» et non le «superconscient» qui devrait logiquement en être le corrélatif; c’est bien là, à n’en pas douter, l’expression d’une extension qui s’opère uniquement par le bas, c’est-à-dire du côté qui correspond, ici dans l’être humain comme ailleurs dans le milieu cosmique, aux «fissures» par lesquelles pénètrent les influences les plus «maléfiques» du monde subtil, nous pourrions même dire celles qui ont un caractère véritablement et littéralement «infernal». Certains adoptent aussi, comme synonyme ou équivalent de «subconscient», le terme d’«inconscient» qui, pris à la lettre, semblerait se référer à un niveau encore inférieur mais qui, à vrai dire, correspond moins exactement à la réalité; si ce dont il s’agit était vraiment inconscient, nous ne voyons même pas bien comment il serait possible d’en parler, et surtout en termes psychologiques; et d’ailleurs en vertu de quoi, si ce n’est d’un simple préjugé matérialiste ou mécaniste, faudrait-il admettre qu’il existe réellement quelque chose d’inconscient ? Quoi qu’il en soit, ce qui est encore digne de remarque, c’est l’étrange illusion par laquelle les psychologues en arrivent à considérer des états comme d’autant plus «profonds» qu’ils sont tout simplement plus inférieurs; n’y a-t-il pas déjà là comme un indice de la tendance à aller à l’encontre de la spiritualité qui seule peut être dite véritablement profonde puisque seule elle touche au principe et au centre même de l’être ? D’autre part, le domaine de la psychologie ne s’étant point étendu vers le haut, le «superconscient», naturellement, lui demeure aussi complètement étranger et fermé que jamais; et lorsqu’il lui arrive de rencontrer quelque chose qui s’y rapporte, elle prétend l’annexer purement et simplement en l’assimilant au «subconscient»; c’est là, notamment, le caractère à peu près constant de ses prétendues explications concernant des choses telles que la religion, le mysticisme, et aussi certains aspects des doctrines orientales comme le Yoga; et dans cette confusion du supérieur avec l’inférieur, il y a déjà quelque chose qui peut être regardé proprement comme constituant une véritable subversion.
Remarquons aussi que, par l’appel au «subconscient», la psychologie, tout aussi bien que la «philosophie nouvelle», tend de plus en plus à rejoindre la «métapsychique» ; et, dans la même mesure, elle se rapproche inévitablement, quoique peut-être sans le vouloir (du moins quant à ceux de ses représentants qui entendent demeurer matérialistes malgré tout), du spiritisme et des autres choses plus ou moins similaires, qui toutes s’appuient, en définitive, sur les mêmes éléments obscurs du psychisme inférieur. Si ces choses, dont l’origine et le caractère sont plus que suspects, font ainsi figure de mouvements «précurseurs» et alliés de la psychologie récente, et si celle-ci en arrive, fût-ce par un chemin détourné, mais par là même plus aisé que celui de la «métapsychique» qui est encore discutée dans certains milieux, à introduire les éléments en question dans le domaine courant de ce qui est admis comme science «officielle», il est bien difficile de penser que le vrai rôle de cette psychologie, dans l’état présent du monde, puisse être autre que de concourir activement à la seconde phase de l’action antitraditionnelle. À cet égard, la prétention de la psychologie ordinaire, que nous signalions tout à l’heure, à s’annexer, en les faisant rentrer de force dans le «subconscient», certaines choses qui lui échappent entièrement par leur nature même, ne se rattache encore, malgré son caractère assez nettement subversif, qu’à ce que nous pourrions appeler le côté enfantin de ce rôle, car les explications de ce genre, tout comme les explications «sociologiques» des mêmes choses sont, au fond, d’une naïveté «simpliste» qui va parfois jusqu’à la niaiserie; en tout cas, cela est incomparablement moins grave, quant à ses conséquences effectives, que le côté véritablement «satanique» que nous allons avoir à envisager maintenant d’une façon plus précise en ce qui concerne la psychologie nouvelle.
Ce caractère «satanique» apparaît avec une netteté toute particulière dans les interprétations psychanalytiques du symbolisme, ou de ce qui est donné comme tel à tort ou à raison; nous faisons cette restriction parce que, sur ce point comme sur tant d’autres, il y aurait, si l’on voulait entrer dans le détail: bien des distinctions à faire et bien des confusions à dissiper : ainsi, pour prendre seulement un exemple typique, un songe dans lequel s’exprime quelque inspiration «supra-humaine» est véritablement symbolique, tandis qu’un rêve ordinaire ne l’est nullement, quelles que puissent être les apparences extérieures. Il va de soi que les psychologues des écoles antérieures avaient déjà tenté bien souvent, eux aussi, d’expliquer le symbolisme à leur façon et de le ramener à la mesure de leurs propres conceptions; en pareil cas, si c’est vraiment de symbolisme qu’il s’agit, ces explications par des éléments purement humains, là comme partout où l’on a affaire à des choses d’ordre traditionnel, méconnaissent ce qui en constitue tout l’essentiel ; si au contraire il ne s’agit réellement que de choses humaines, ce n’est plus qu’un faux symbolisme, mais le fait même de le désigner par ce nom implique encore la même erreur sur la nature du véritable symbolisme. Ceci s’applique également aux considérations auxquelles se livrent les psychanalystes, mais avec cette différence qu’alors ce n’est plus d’humain qu’il faut parler seulement, mais aussi, pour une très large part, d’«infra-humain»; on est donc cette fois en présence, non plus d’un simple rabaissement, mais d’une subversion totale; et toute subversion, même si elle n’est due, immédiatement du moins, qu’à l’incompréhension et à l’ignorance (qui sont d’ailleurs ce qui se prête le mieux à être exploité pour un tel usage), est toujours, en elle-même, proprement «satanique». Du reste, le caractère généralement ignoble et répugnant des interprétations psychanalytiques constitue, à cet égard, une «marque» qui ne saurait tromper; et ce qui est encore particulièrement significatif à notre point de vue, c’est que, comme nous l’avons montré ailleurs (Voir L'Erreur Spirite), cette même «marque» se retrouve précisément aussi dans certaines manifestations spirites; il faudrait assurément beaucoup de bonne volonté, pour ne pas dire un complet aveuglement, pour ne voir là encore rien de plus qu’une simple «coïncidence». Les psychanalystes peuvent naturellement, dans la plupart des cas, être tout aussi inconscients que les spirites de ce qu’il y a réellement sous tout cela; mais les uns et les autres apparaissent comme également «menés» par une volonté subversive utilisant dans les deux cas des éléments du même ordre, sinon exactement identiques, volonté qui, quels que soient les êtres dans lesquels elle est incarnée, est certainement bien consciente chez ceux-ci tout au moins, et répond à des intentions sans doute fort différentes de tout ce que peuvent imaginer ceux qui ne sont que les instruments inconscients par lesquels s’exerce leur action.
Dans ces conditions, il est trop évident que l’usage principal de la psychanalyse, qui est son application thérapeutique, ne peut être qu’extrêmement dangereux pour ceux qui s’y soumettent et même pour ceux qui l’exercent car ces choses sont de celles qu’on ne manie jamais impunément; il ne serait pas exagéré d’y voir un des moyens spécialement mis en œuvre pour accroître le plus possible le déséquilibre du monde moderne et conduire celui-ci vers la dissolution finale. Ceux qui pratiquent ces méthodes sont, nous n’en doutons pas, bien persuadés au contraire de la bienfaisance de leurs résultats; mais c’est justement grâce à cette illusion que leur diffusion est rendue possible et c’est là qu’on peut voir toute la différence qui existe entre les intentions de ces «praticiens» et la volonté qui préside à l’œuvre dont ils ne sont que des collaborateurs aveugles. En réalité, la psychanalyse ne peut avoir pour effet que d’amener à la surface, en le rendant clairement conscient, tout le contenu de ces «bas-fonds» de l’être qui forment ce qu’on appelle proprement le «subconscient» ; cet être, d’ailleurs, est déjà psychiquement faible par hypothèse, puisque, s’il en était autrement, il n’éprouverait aucunement le besoin de recourir à un traitement de cette sorte; il est donc d’autant moins capable de résister à cette «subversion», et il risque fort de sombrer irrémédiablement dans ce chaos de forces ténébreuses imprudemment déchaînées; si cependant il parvient malgré tout à y échapper, il en gardera du moins, pendant toute sa vie, une empreinte qui sera en lui comme une «souillure» ineffaçable.
Nous savons bien ce que certains pourraient objecter ici en invoquant une similitude avec la «descente aux Enfers», telle qu’elle se rencontre dans les phases préliminaires du processus initiatique; mais une telle assimilation est complètement fausse, car le but n’a rien de commun, non plus d’ailleurs que les conditions du «sujet» dans les deux cas; on pourrait seulement parler d’une sorte de parodie profane, et cela même suffirait à donner à ce dont il s’agit un caractère de «contrefaçon» plutôt inquiétant. La vérité est que cette prétendue «descente aux Enfers», qui n’est suivie d’aucune «remontée», est tout simplement une «chute dans le bourbier», suivant le symbolisme usité dans certains Mystères antiques; on sait que ce «bourbier» avait notamment sa figuration sur la route qui menait à Eleusis, et que ceux qui y tombaient étaient des profanes qui prétendaient à l’initiation sans être qualifiés pour la recevoir et qui n’étaient donc victimes que de leur propre imprudence. Nous ajouterons seulement qu’il existe effectivement de tels «bourbiers» dans l’ordre macrocosmique aussi bien que dans l’ordre microcosmique; ceci se rattache directement à la question des «ténèbres extérieures», et l’on pourrait rappeler, à cet égard, certains textes évangéliques dont le sens concorde exactement avec ce que nous venons d’indiquer. Dans la «descente aux Enfers», l’être épuise définitivement certaines possibilités inférieures pour pouvoir s’élever ensuite aux états supérieurs; dans la «chute dans le bourbier», les possibilités inférieures s’emparent au contraire de lui, le dominent et finissent par le submerger entièrement.
Nous venons de parler encore ici de «contrefaçon» ; cette impression est grandement renforcée par d’autres constatations, comme celle de la dénaturation du symbolisme que nous avons signalée, dénaturation qui tend d’ailleurs à s’étendre à tout ce qui comporte essentiellement des éléments «suprahumains», ainsi que le montre l’attitude prise à l’égard de la religion, et même des doctrines d’ordre métaphysique et initiatique telles que le Yoga, qui n’échappent pas davantage à ce nouveau genre d’interprétation, à tel point que certains vont jusqu’à assimiler leurs méthodes de «réalisation» spirituelle aux procédés thérapeutiques de la psychanalyse. Il y a là quelque chose de pire encore que les déformations plus grossières qui ont cours également en Occident, comme celle qui veut voir dans ces mêmes méthodes du Yoga une sorte de «culture physique» ou de thérapeutique d’ordre simplement physiologique, car celles-ci sont, par leur grossièreté même, moins dangereuses que celles qui se présentent sous des aspects plus subtils. La raison n’en est pas seulement que ces dernières risquent de séduire des esprits sur lesquels les autres ne sauraient avoir aucune prise; cette raison existe assurément, mais il y en a une autre, d’une portée beaucoup plus générale, qui est celle même pour laquelle les conceptions matérialistes, comme nous l’avons expliqué, sont moins dangereuses que celles qui font appel au psychisme inférieur. Bien entendu, le but purement spirituel, qui seul constitue essentiellement le Yoga comme tel, et sans lequel l’emploi même de ce mot n’est plus qu’une véritable dérision, n’est pas moins totalement méconnu dans un cas que dans l’autre; en fait, le Yoga n’est pas plus une thérapeutique psychique qu’il n’est une thérapeutique corporelle, et ses procédés ne sont en aucune façon ni à aucun degré un traitement pour des malades ou des déséquilibrés quelconques; bien loin de là, ils s’adressent au contraire exclusivement à des êtres qui, pour pouvoir réaliser le développement spirituel qui en est l’unique raison d’être, doivent être déjà, du fait de leurs seules dispositions naturelles, aussi parfaitement équilibrés que possible; il y a là des conditions qui, comme il est facile de le comprendre, rentrent strictement dans la question des qualifications initiatiques.
Ce n’est pas tout encore, et il y a même autre chose qui, sous le rapport de la «contrefaçon», est peut-être encore plus digne de remarque que tout ce que nous avons mentionné jusqu’ici: c’est la nécessité imposée, à quiconque veut pratiquer professionnellement la psychanalyse, d’être préalablement «psychanalysé» lui-même. Cela implique avant tout la reconnaissance du fait que l’être qui a subi cette opération n’est plus jamais tel qu’il était auparavant, ou que, comme nous le disions tout à l’heure, elle lui laisse une empreinte ineffaçable, comme l’initiation, mais en quelque sorte en sens inverse, puisque, au lieu d’un développement spirituel, c’est d’un développement du psychisme inférieur qu’il s’agit ici. D’autre part, il y a là une imitation manifeste de la transmission initiatique; mais étant donné la différence de nature des influences qui interviennent, et comme il y a cependant un résultat effectif qui ne permet pas de considérer la chose comme se réduisant à un simple simulacre sans aucune portée, cette transmission serait bien plutôt comparable, en réalité, à celle qui se pratique dans un domaine comme celui de la magie, et même plus précisément de la sorcellerie. Il y a d’ailleurs un point fort obscur, en ce qui concerne l’origine même de cette transmission: comme il est évidemment impossible de donner à d’autres ce qu’on ne possède pas soi-même, et comme l’invention de la psychanalyse est d’ailleurs chose toute récente, d’où les premiers psychanalystes tiennent-ils les «pouvoirs» qu’ils communiquent à leurs disciples, et par qui eux-mêmes ont-ils bien pu être «psychanalysés» tout d’abord? Cette question, qu’il n’est cependant que logique de poser, du moins pour quiconque est capable d’un peu de réflexion, est probablement fort indiscrète et il est plus que douteux qu’il y soit jamais donné une réponse satisfaisante; mais à vrai dire, il n’en est pas besoin pour reconnaître, dans une telle transmission psychique, une autre «marque» véritablement sinistre par les rapprochements auxquels elle donne lieu : la psychanalyse présente, par ce côté, une ressemblance plutôt terrifiante avec certains «sacrements du diable» !

Le « OUI » de Prajnânpad




La peur doit être bannie de votre vie.

La peur que quelque chose arrive est pire que la chose elle-même. Les peureux meurent bien des fois avant l'heure de leur mort. La peur doit être bannie de votre vie car elle est irrationnelle et bloque l'action.

« On regarde en avant et en arrière et on languit pour ce qui n'existe pas », dit Shelley.

L'habitude pernicieuse de penser au futur et au passé doit être brisée. Il ne faut tolérer ni que le passé vous domine, ni que le miroitement du futur influence le présent, la réalité. C'est seulement quand le passé et le futur sont éliminés que vous pouvez effectivement vivre dans le présent. Le présent seul est réel. Le passé et le futur sont de pures illusions. Vivez dans le présent et vous serez heureux. Vivre dans le présent cela signifie accepter tout ce qui vient. Au lieu de le rejeter, de lui attribuer les qualificatifs de bon et mauvais, d'agréable ou de désagréable, expérimentez tout ce qui vient, parce que c'est la vie. Ne fuyez pas la vie.

Quand nous disons qu'une chose est bonne ou mauvaise pour la chasteté, nous ne voyons pas les choses comme elles sont. Il n'y a ni bien ni mal dans un objet. Quand on boit trop d'alcool, on dit que l'alcool est mauvais. Son caractère mauvais réside en nous-mêmes et non pas dans l'alcool. Vous êtes dans une cage de verre et vous appelez cela une forteresse. Comment peut-il y avoir une limite à l'état de Brahmachari (celui qui a accédé au premier stade de la vie selon les Védas) ? Tout ce que vous jetez dans le feu est consumé par lui. De même, s'il y a un véritable état de Brahmachari à l'intérieur, tout ce qui vient en contact avec lui sera transformé. Nous devons régner sur tout ce qui nous concerne. Le vrai moine (sannyasin) est maître de lui-même dans toutes les circonstances. Il portera la soie la plus coûteuse avec la même tranquillité que des haillons déchirés, il mangera une nourriture princière ou la soupe paysanne avec une égale satisfaction. Mais il sera modéré et mangera selon ses besoins. Il ne dormira pas davantage s'il est sur un matelas moelleux. Il n'est l'esclave de rien et peut en quelque sorte s'adapter facilement et joyeusement à toutes les circonstances. Si un morceau de gingembre bouleverse votre état de Brahmachari, alors, que vaut cet état ?

Acceptez-vous vous-même

Ce que vous êtes, vous l'êtes ! Acceptez-le avec tout votre être et pas seulement intellectuellement. Les circonstances sont comme elles sont parce que c'est ainsi que vous les avez faites. C'est le but que vous avez poursuivi dans le passé. C'est donc à vous. Il vous appartient. Il n'est pas question de ne pas accepter ce qui est à vous. Vous l'avez demandé et c'est venu.

Ne vous rejetez pas vous-même en tout ou en partie. Si vous le faites vous ne pouvez plus être vous-même. Si vous vous rejetez vous-même, comment pouvez-vous accepter les autres ? Ce que vous voyez à l'extérieur n'est qu'une projection de vous-même. Le monde entier tel que vous le voyez n'est qu'une projection de vous-même. Vous ne voyez que vous-même partout.

Aussi, acceptez émotionnellement chaque chose y compris vous-même et voyez intellectuellement ce qui peut être fait si quelque chose peut être fait. Dans la réalité, faites-le. Puisque cela vous est arrivé, vous ne pouvez pas l'annuler. Alors ? Acceptez-le. Dites oui à toute chose. C'est à vous. C'est là.

Il faut accepter ou rejeter. Si vous ne pouvez pas dire oui, dites non. Il n'y a rien entre les deux. Entre les deux est une illusion. « J'accepte mais... » C'est un mensonge. Ce « mais » est émotionnel. Si vous avez accepté, vous avez accepté de tout votre cœur et complètement. Si vous êtes incapable d'accepter ce qui arrive, rejetez-le, c'est-à-dire voyez la cause pour laquelle c'est arrivé et cherchez à éliminer cette cause. Si la cause est éliminée, l'effet disparaîtra également. Si, toutefois il ne vous est pas possible d'éliminer la cause de ce qui arrive, laissez-la. Acceptez-la comme vous appartenant et expérimentez-la. Le plaisir et la peine, le chaud et le froid sont les deux aspects d'une même chose. Si vous avez un furoncle qui vous gratte, cela vous gratte. Un point c'est tout. A partir du moment où vous vous identifiez avec celui-ci il se met à vous faire mal, ce qui signifie que vous ne l'acceptez pas, bien qu'il soit là. La vérité (Tattvam) est ce qui est. Connaître la vérité, c'est voir ce qui est sans vous identifier ni vous projeter. L'accepter, c'est en faire une part de vous-même. Quand ce qui est, est une part de vous-même, comment pouvez-vous ne pas vous sentir à l'aise avec ce qui est ?

Svâmi Prajnânpad, « Entretiens ».


 Entretiens

Prenant délibérément le contrepied de certaines formules stéréotypées de l'hindouisme traditionnel, Svâmi Prajnânpad (Svâmiji) citait souvent l'injonction du grand sage Vashista au jeune prince Rama : " Agis, jouis, connais ". Svâmiji voyait dans la psychanalyse le chaînon manquant qui permettait de rendre concrètes, pratiques et expérimentales les vérités - comprises souvent de manière intellectuelle - des Upanishads et de l'Advaîta Vedanta. " Srinivasan a approché Svâmiji en disciple, cherchant à se libérer de ses illusions, de ses fausses conceptions, de ses perceptions déformées pour atteindre la vérité, la réalité, la communion avec ce qui est. C'est dans cet esprit que ce petit livre doit être lu. Alors son apparente simplicité révèle des trésors ". Arnaud Desjardins (Extrait de la préface). " Un livre agréable, fécond d'une expérience de la vie qui permettra cru lecteur français de mieux connaître un courant de pensée propre à lui ouvrir des voies nouvelles dans la connaissance universelle ". Bulletin critique du livre français.


Textes gratuits :


René Guénon ne partageait pas l'intérêt de Prajnânpad pour la psychanalyse. Lire le texte de Guénon, "Les méfaits de la psychanalyse" :


Photo :
Les sannyasins de Juna Akhada vénèrent le dieu Dattatrya, une des nombreuses formes de Shiva.


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Sai Baba est mort !




Le gourou indien Sai Baba, connu dans le monde entier et considéré par ses millions de sympathisants comme un dieu vivant, est mort en Inde à 85 ans... Lire la suite :

samedi, avril 23, 2011

Cette cause échappe à toute appellation, à tout savoir




Des sectes néo-bouddhistes, qui incitent à s'anéantiser, sont les tentacules à ventouse de la vacuité luciférienne. « Le vide qui les caractérise fascine les êtres faibles et les aspire comme un gouffre ; de tels êtres, faibles parce que dégénérés ou tarés, y puisent la volupté du vertige ou la morbide nostalgie du néant. » (Jean Louis Bernard)

La véritable vacuité de l'esprit 

Nous élevant plus haut, nous disons maintenant que cette Cause n'est ni âme ni intelligence ; qu'elle ne possède ni imagination, ni opinion, ni raison, ni intelligence ; qu'elle ne se peut exprimer ni concevoir ; qu'elle n'a ni nombre, ni ordre, ni grandeur, ni petitesse, ni égalité, ni inégalité, ni similitude, ni dissimilitude ; qu'elle ne demeure immobile ni ne se meut ; qu'elle ne se tient au calme, ni ne possède de puissance ; qu'elle n'est ni puissance, ni lumière ; qu'elle ne vit ni n'est vie ; qu'elle n'est ni essence, ni perpétuité, ni temps ; qu'on ne peut la saisir intelligiblement ; qu'elle n'est ni science, ni vérité, ni royauté, ni sagesse, ni un, ni unité, ni déité, ni bien, ni esprit au sens où nous pouvons l'entendre, ni filiation, ni paternité, ni rien de ce qui est accessible à notre connaissance, ni à la connaissance d'aucun être ; qu'elle n'est rien de ce qui appartient au non-être, mais rien non plus de ce qui appartient à l'être ; que personne ne la connaît telle qu'elle est, mais qu'elle-même ne connaît personne en tant qu'être ; qu'elle échappe à tout raisonnement, à toute appellation, à tout savoir ; qu'elle n'est ni ténèbres, ni lumière, ni erreur, ni vérité ; que d'elle on ne peut absolument ni rien affirmer ni rien nier ; que, lorsque nous posons des affirmations et des négations qui s'appliquent à des réalités inférieures à elle, d'elle-même nous n'affirmons ni ne nions rien, car toute affirmation reste en deçà de la Cause unique et parfaite de toutes choses, car toute négation demeure en deçà de la transcendance de Celui qui est simplement dépouillé de tout et qui se situe au-delà de tout.

Denys l'Aréopagite, « Théologie mystique », traduction de Maurice Gandillac.

Commentaire de Jacques Brosse, moine Zen et spécialiste des religions :

« La Théologie mystique de Denys l'Aréopagite est un exposé radical de l'apophatisme (du grec apophasis, « négation »). Cette démarche de l'esprit, puisqu'elle vise en définitive la transcendance, ne peut définir l'infini, elle procède donc par propositions négatives (on peut dire ce que Dieu n'est pas), plutôt que positives (on ne peut dire ce qu'il est).

Denys lui-même, dans sa Lettre à Titos, distingue deux théologies. L'une, philosophique, spéculative, opère par voie de démonstration - elle est « cataphatique » son domaine est le visible. L'autre procède par symboles et suppose une initiation - elle est apophatique -, son domaine est l'invisible. Elle est mystique en ce sens que le mystère ne peut être révélé que par Dieu. »

La Théologie mystique de Denys l'Aréopagite



Commentaire de la « Théologie mystique » de Denys, le Pseudo-Aréopagite par Albert le Grand

Le Commentaire de la « Théologie mystique » du fameux théologien grec Denys (VIe siècle, dit « le Pseudo-Aréopagite ») que saint Albert le Grand propose est un monument de premier ordre, fruit de l'âge d'or de la théologie de notre XIIIe siècle. Discernant avec compétence l'enracinement de l’œuvre dans la tradition des Pères grecs qui allient estime pour la philosophie et primauté indiscutée de la Révélation, Albert propose ici une acceptation de haut style des notions de mystique, foi, nuit et grâce divinisante, toutes requises pour l'accueil lucide du message biblique.

Avec originalité, l'interprétation insiste sur le rôle primordial de l'intelligence dans l'adhésion de la foi aux réalités divines. Elle écarte ainsi une lecture ruineuse qui, réduisant la foi et la mystique au seul amour, devait dès le XIVe siècle devenir position de repli pour les spirituels à bon droit insatisfaits du rationalisme montant. Reliant avec justesse les notions parentes de mystique et de mystère le mystère du Verbe incarné révélé - elle entend par mystique l'accomplissement de la foi théologale en sa référence au Christ Révélateur.
Précédée par une Introduction qui précise utilement l'essentiel de la démarche négative selon Denys, la présente traduction - première version française rappelle en note les principales explications préliminaires offertes dans les commentaires par Albert de la Hiérarchie céleste et des Noms divins. Elle joint la traduction des Épîtres I à V qui élucident des points obscurs de la Théologie mystique.

Le présent Commentaire a exercé une notable influence sur Thomas d'Aquin (disciple direct d'Albert) qui en a fait bénéficier, sa théologie de la foi. Il a également favorisé, un peu plus tard, l’œuvre mystique de Maître Eckhart, centrée sur la relation directe du fidèle avec le Verbe divin incarné.




Le plan dirigé contre l’Esprit

La lutte pour la supériorité et les spéculations continuelles dans le monde des affaires créera une société démoralisée, égoïste et sans cœu...