samedi, octobre 01, 2022

Une civilisation fondée sur la possession





L’Occident, ce lieu où le soleil se couche, est aussi - géographiquement - ce petit cap de l'Asie qui a vu une prépondérance matérielle unique, sans exemple dans l'histoire des derniers siècles, et où la technique a rêvé et rêve toujours d'asservir de façon complète ce qui s'ouvrait, avec une complaisance toujours plus grande à ses efforts : non le ciel et l'esprit, mais la nature et la matière.

Cet effort est devenu l'essentiel de la pseudo-élite intellectuelle occidentale. Il convient d'user à ce propos d'un mot qui appartient au vocabulaire diabolique : celui de possession. L’Occidental est un homme estimant souhaitable et possible l'entière possession de la nature, la « maîtrise de la matière », ignorant que cette possession dénature l'objet de ses vœux. Cette maîtrise de la matière, pour être plus aisée, plus rapide et plus complète, a été codifiée. Ses principes, inversement et analogiquement identiques à ceux de la maîtrise, de l'esprit, dont l'Occident s’est toujours détourné, à part certains esprits qui se désintéressaient de la science, sont ceux de l'expérimentation et d’une foi absolue en celle-ci. Alors que la croyance en l'esprit vise à l’Unité et à la fusion, la croyance aveugle à son encontre cherche à aboutir à la division et à la multiplication matérielles.

Le langage moderne parle d’une « mise en valeur », d’ une « exploitation » de la nature : « exploitation » avait autrefois en latin le sens d’une action menée à son terme, d’une saisie; en jurisprudence, un « exploit » menait à une saisie. Une « saisie » est aussi une possession. L’homme moderne est celui qui veut « saisir » la nature, la posséder entièrement. Autre « hasard » : nous retrouvons ici le langage juridique appartenant au signe de la justice qu’est la Balance.

En « possédant » la nature, l'homme moderne ne peut bien entendu que l’appréhender sur le plan le plus grossier, le plan matériel. Il ne demande rien d'autre puisqu'il se dit matérialiste, étant le premier à fonder une civilisation dont les principes, au lieu de se référer aux astres, nient l’action de ceux-ci. Fondant une civilisation sur la matière, il se lie à celle-ci, s’y subordonnant avant d’en suivre le destin.

Rarement civilisation aura été plus « exploratrice » - le mot vient du latin « explorare » : parcourir en étudiant. Cette étude, l’Occidental l'a faite en imposant la guerre en lieu et place de la paix, asservissant des peuples entiers au nom de son avidité.

La civilisation constitue l’ensemble des caractères d’une société. Pour dépeindre cette société occidentale (qui a toujours cherché à asservir les groupes sociaux qu’elle « étudiait ») : le monde hispanique opprimant l’Amérique du Sud ; Français et Anglais envahissant l’Égypte, le Moyen-Orient, etc., Nord-Américains massacrant les Indiens, etc., il suffit d’inverser la Balance, obtenant ainsi au lieu d’une prépondérance spirituelle, une prépondérance matérielle ; au lieu de la justice, l'injustice ; au lieu de la paix, une série ininterrompue de conflits.

Cette exploration du monde qui consacrait le triomphe de la force brutale ne pouvait être durable; l'Occidental est l’homme ayant imprudemment réveillé des forces brutales, celles des masses. C’est l'homme qui aura sorti l’Orient de sa paix - ce qu’il appelait « son sommeil » - remplaçant sa religion et son idéal de conciliation par les forces matérielles de vindicte et de brutalité, par les armes avec lesquelles il entendait le juguler et le faire travaillera son profit. En définitive, il lui aura apporté sa science, son industrie et sa révolution. Dans ces trois termes ainsi définis nous retrouvons comme dénominateur commun la matière.

Au terme de cette exploration, ayant étudié et parfait sa prépondérance matérielle, l’Occident, fidèle à lui-même, devait délaisser les terres lointaines qui commençaient à lui être disputées par ceux qu’il venait d’éveiller à son « idéal», pour un autre domaine, où l’entraînait logiquement ses appétits : celui de la matière. Cette exploration de la matière devait être celle de la chute solaire et de son inversion : au lieu d’un soleil donnant la vie, un anti-soleil à la même température, mais donnant la mort : une bombe (1). L’Occident réalisait alchimiquement la « chute » du Soleil. Il ne s’agissait pas non plus d'un « hasard », cette « chute » ayant lieu pour la première fois dans le signe complémentaire de la Balance, celui du Bélier, qui gouverne le Japon. Quelques années plus tard, dans le cycle toujours avançant, un pays Balance - la Chine - devenait, par la maîtrise de ce secret de la chute du Soleil, le premier pays asiatique à édifier une industrie atomique. C’est là que s’est arrêté, pour un temps, le fléau de la balance, qui est aussi celui de la justice.

Hadès, « Les mystères du zodiaque ».


(1) La réalisation d'une bombe atomique suppose une « chute » de celle-ci. Dans toutes les réalisations scientifiques occidentales, nous retrouvons cette notion de « chute ».

Dessin :
Tardi, « C'était la guerre des tranchées ».

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