mardi, mai 15, 2007

Alexandra David-Néel à l'âge de 101 ans




Le 19 mars 1969, quelques mois avant cette interview, Alexandra David-Néel signe la révision de son écrit libertaire, « Pour la vie », publié pour la première fois en 1898 et préfacé par son ami l’anarchiste Elisée Reclus : « Ceci est un livre fier, écrit par une femme plus fière encore. »

Contre les pressions et les obligations qu’imposent à l’homme religion, éducation et société, Alexandra affirme la primauté évidente, parce que biologique, de l’instinct spontané qui conduit chacun vers le plein épanouissement de soi-même par-delà tous les préjugés, toutes les distorsions auxquels, dans son inconscience, il se résigne. « L’obéissance, écrit-elle hardiment, c’est la mort. Chaque instant dans lequel l’homme se soumet à une volonté étrangère est un instant retranché de sa vie. » Rien d’autre ne devrait prévaloir contre le sens intérieur qui est la voix même de la nature en nous.
Partir de là, de cet affranchissement profond, c’est être amené à régler leur compte à ces fantômes encombrants qui nous oppriment. Ce qu’Alexandra ne manque pas de faire avec une sorte de joie féroce, sapant à la base ces constructions de papier qui prétendent nous imposer un Bien inventé de toutes pièces et nous interdire un Mal « officiel » qui n’est autre que « la vie elle-même avec tous ses désirs et toutes ses joies, son besoin de liberté, sa curiosité des choses, ses fières révoltes, son horreur de la souffrance, tout ce qui est Beau et Vrai ». Cette révolte absolue et lucide trouve son origine dans l’anarchisme idéaliste, tel que le professait Elisée Reclus, et qui était par ailleurs si conforme au tempérament même de cette « femme fière », mais elle s’appuie aussi sur les philosophie extrême-orientales, sur les pensées hindoue et bouddhisme qu’elle venait de découvrir en leur pays d’origine de la bouche même des sages qu’elle y avait rencontrés. C’est en se référant à elles qu’Alexandra peut affirmer avant tant d’intrépidité « l’inanité » de tout ce qui n’est point fondé sur l’expérience personnelle, l’absence de sanction en dehors de nous-mêmes, l’inutilité de la culpabilité, du remords et du regret et, enfin, le caractère illusoire du moi. Si quelques passages, sur la science par exemple, nous semblent maintenant faire date, en revanche nombre de points de vue ici exprimés demeurent remarquablement actuels et sont, même aujourd’hui, des ferments d’avenir : telle sa critique acerbe de la démagogie et même du suffrage universel, telles ses références à ce que l’on a, depuis, appelé l’écologie, telle enfin certaine note singulièrement hardie sur le droit à la contraception.
En fait, dans ce petit texte, qui semble avoir été écrit d’un seul jet, Alexandra a livré le fond de sa pensée, son point de vue sur le monde, sa Weltanschauung et, somme toute, elle n’y reviendra plus, mais ses premières réflexions lui serviront de guide de conduite durant toute sa vie. Aussi n’est-il pas surprenant que, sentant la mort approcher, elle ait repris ce texte oublié, mais qui avait reçu la sanction de toute son existence. A plus de cent ans, elle l’a relu et corrigé en vue d’une réédition, comme s’il s’agissait du testament qu’elle souhaitait laisser.

Jacques Brosse

Alexandra David-Néel, Pour la Vie, et autres textes libertaires inédits, 1895 – 1907, éditions Les Nuits Rouges.

Table des matières :
Pour la Vie
De l’Autorité
Droits et Devoirs
Les Personnalités Fictives
De la Recherche du Bonheur dans le Présent
De l’Antagonisme des Intérêts
Textes Libertaires Inédits
Notes sur le Bouddhisme
Autorité Paternelle
Faillite
Question Pressante
Sur le Bonheur
Sur la « Morale » Laïque
Echos du Congrès des Femmes Italiennes
Le Mariage, Profession pour Femme

http://www.alexandra-david-neel.org/francais/accf.htm

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