vendredi, juillet 12, 2013

Occident chrétien





Les Allemands sont des chrétiens, c'est sûr. Ils vivent dans le nord comme tous les autres, dans ce que nous appelons Blad Teldj, le pays de la neige. Allah n'a pas fait de cadeau aux chrétiens : leur climat est froid et rigoureux, ce qui les met de mauvaise humeur. Quand le soleil ne se montre pas pendant des mois, ils deviennent méchants. Pour se réchauffer, ils sont obligés de boire du vin et d'autres boissons fortes qui les rendent agressifs, et ils commencent à chercher des noises aux autres. Ils boivent parfois du thé, comme tout le monde, mais même leur thé est amer et bouillant, très différent du nôtre, toujours parfumé à la menthe, à l'absinthe ou au myrte. Cousin Zin, qui est allé en Angleterre, dit que le thé, là-bas, est si amer qu'ils sont obligés d'y mettre du lait. Samir et moi avons donc essayé une fois de verser du lait dans notre thé à la menthe, juste pour voir. C'était dégoûtant ! Pas étonnant que les chrétiens soient malheureux et cherchent sans arrêt la bagarre !

Quoi qu'il en soit, il semblait que les Allemands avaient préparé en secret, depuis des années, une immense armée. Personne n'était au courant, et un beau jour ils ont envahi la France. Ils ont colonisé Paris, la capitale française, et ont commencé à donner des ordres aux gens, exactement comme les Français le font ici, à Fès. Nous avions de la chance quand même, parce que, au moins, les Français n'aimaient pas notre Médina, la cité de nos ancêtres, et ont donc construit la Ville Nouvelle pour y habiter. Quand j'ai demandé à Samir ce qui se serait passé si les Français avaient trouvé la Médina à leur goût, il m'a répondu qu'ils nous auraient tous jetés dehors pour prendre nos maisons. Cependant, ces mystérieux Allemands n'en voulaient pas seulement aux Français. Ils ont aussi déclaré la guerre aux juifs. Les Allemands obligent les juifs à porter quelque chose de jaune chaque fois qu'ils mettent le nez dehors, tout comme les musulmans exigent que les femmes portent un voile, pour pouvoir immédiatement les repérer.

Pourquoi les Allemands en voulaient aux juifs, personne dans la cour ne pouvait vraiment le dire. Samir et moi posions sans arrêt des questions, courant d'un groupe de brodeuses à l'autre, dans l'après-midi calme, mais nous n'obtenions que des suppositions. « C'est peut-être la même chose que pour les femmes ici, disait ma mère. Personne ne sait vraiment pourquoi les hommes nous forcent à porter le voile. C'est sans doute une question de différence. La peur de la différence fait agir les gens de façon très bizarre. Les Allemands se sentent probablement plus en sécurité quand ils sont entre eux. C'est comme les hommes dans la Médina, qui deviennent nerveux dès qu'une femme apparaît. Si les juifs insistent pour rester différents, ça peut déstabiliser les Allemands. Le monde est fou ! »

Fatima Mernissi

Rêves de femmes
Une enfance au harem

« Je suis née en 1940 dans un harem à Fès, ville marocaine du IXe siècle, située à cinq mille kilomètres à l'ouest de La Mecque, et à mille kilomètres au sud de Madrid, l'une des capitales des féroces chrétiens. » Ainsi commence le récit de Fatima Mernissi, cascades de contes d'une enfance où merveilleux et quotidien se côtoient et s'embrouillent. Habiba, l'illettrée qui récite par cœur Les Mille et Une Nuits, est-elle réelle ou fictive ? Et Tamou, la cavalière rifaine qui surgit du Nord, bardée d'armes et de bijoux ? Et Charna, et la princesse Boudour ? Qui sait ? L'écrivaine elle-même est incertaine : « C'est un récit sur les frontières, elles bougent par définition ! »


La guerre contre l’Islam est-elle une phase de la guerre ultime : la Guerre contre le Christ ?

La doctrine de la « démocratie libérale et des droits de l’homme » est une crypto-religion, une forme extrême, hérétique de judaïsme christ...