samedi, avril 10, 2010

Merigar


Merigar en Italie est un centre de loisirs spirituels où la danse du Vajra, le yantra yoga, l’entraînement Santi Maha Sangha (SMS) en neuf niveaux s’ajoutent à la pratique méditative des touristes dzogchenpa venus dépenser leur argent dans le centre du lama Namkhaï Norbu. Pour les adeptes plus casaniers, Namkhaï Norbu procède à la transmission mondiale du Gourou Yoga à l’aide d’une vidéo…

Autrefois, les véritables adeptes du Dzogchen étaient plus anachorètes que consommateurs de produits spirituels à l’instar du moine vagabond Shabkar (1781-1850). Shabkar était un esprit libre, il ne vendait pas de méthodes spirituelles et ne voyait pas d’oppositions entre les divers enseignements « non-dualistes ». Shabkar disait :
« Les maîtres d’antan affirmaient que le Madhyamika, le Mahamoudra et le Dzogchen étaient semblables à la mélasse, au sucre et au miel : tous trois sont également délicieux ». Traduit par Matthieu Ricard, « Shabkar, autobiographie d’un yogi tibétain ».

De nos jours, les exigences du marketing spirituel poussent des gourous à se prétendre détenteurs de la meilleure méthode de développement des potentialités de l’homme du 3ème millénaire ou de l’ère du Verseau. Tenzin Namdak ne cache pas son mépris pour les autres voies. Dans une conférence donnée à Vienne (Autriche) le 12 avril 1991, il a déclaré : « Nombreux sont les lamas qui disent, de nos jours, que les vues et les résultats de la pratique du Madhyamika, du Mahamoudra, ou du Dzogchen sont totalement identiques. Mais cela n’est pas vrai ». Dans cette conférence, Tenzin namdak affirme la supériorité du Dzogchen sur les autres véhicules. Bien entendu, l’influence du Chan chinois sur le Dzogchen du Zhangzhung est ignoré malgré de nombreuses similitudes et la présence d’un patriarche du nom de Darma Bode parmi les six Shen des six principes (don-drug gi gshen-po rnam-pa drug). Le nom de Darma Bode fait dire à Samten Karmay, né dans une famille Bönpo du Tibet et directeur de recherche au CNRS : « Il nous rappelle Bodhidharma, le patriarche de la tradition Chan/Zen ».

L’influence du Chan chinois sur le Dzogchen est aussi escamotée par Namkhaï Norbu, propagateur d’un enseignement assez juteux si l’on en juge par les tarifs pratiqués par la Communauté Dzogchen. Dans son opuscule « Dzogchen et Zen », Namkhaï Norbu dissimule maladroitement l’influence du Chan chinois sur le Dzogchen. Sa démonstration est assez embrouillée et se termine par une déclaration lapidaire qui classe le Chan/Zen parmi les voies de la renonciation. Réduire le Chan à la pratique de la renonciation révèle une volonté de dévalorisation du Chan.

Le Chan est issue du mélange du bouddhisme et du taoïsme libertaire. En réalité, ce courant spirituel libertaire d’origine taoïste agace les gourous tibétains viscéralement autocrates. Il ne faut pas oublier que le véritable sage taoïste n’enseigne pas. En outre, il fait souvent figure de sot. « Si le Tao est insipide, écrit Max Kaltenmark, le taoïste qui l’incarne en quelque sorte ne l’est pas moins, car la lumière qu’il porte en lui reste cachée ; si elle est authentique, elle ne doit pas être perçue extérieurement par le vulgaire. Non seulement la sainteté du vrai taoïste ne doit pas être reconnue, mais sa parfaite simplicité lui donne l’apparence d’un sot. »

Aux antipodes du sage taoïste, les gourous tibétains se laissent volontiers aduler. On se prosterne devant eux. Leur science occulte fascine les personnes désireuses de devenir des surhommes, des initiés aux pouvoirs (siddhis) impressionnants. L’initiation lamaïste n’est-elle pas une transmission de pouvoir (wang) ? Le pouvoir est au cœur du lamaïsme et du fascisme. Namkhaï Norbu est arrivé en Italie en 1960 grâce à Giuseppe Tucci. Pour Brian Victoria, expert néo-zélandais du bouddhisme, Giuseppe Tucci était un sympathisant déclaré du fascisme. En 1964, Namkhaï Norbu est chargé d’enseigner les Langues et la Littérature Tibétaine et Mongole à l’Institut Oriental de Naples. En cinquante ans le gourou tibétain est devenu une star de la nouvelle religiosité mondiale.

Les lamas affirment que la pratique spirituelle a des effets bénéfiques sur l’humanité. Mais le rayonnement du spiritualisme pratiqué à Merigar n’a pas apporté plus de tolérance et d’amour aux Italiens. Au contraire, c’est le fascisme haineux qui a effectué une percée décisive aux élections de mars 2010. Il faut se souvenir que depuis le 9 février 2009, le Dalaï-lama est « citoyen d'honneur » de Rome. Le maire de Rome, Gianni Alemanno, est membre de l’Alliance Nationale, l’héritière du Mouvement Social Italien, un courant d’extrême-droite. Parmi les fondateurs du mouvement Social Italien on trouve d’anciens dignitaires du régime fasciste de Mussolini. Les vieux démons de l’extrême droite italienne font bon ménage avec les rakshasas du lamaïsme.

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